1943, ANNÉE CHARNIÈRE

ANNÉE CHARNIÈRE DE LA SECONDE GUERRE MONDIALE

1943, c’est l’année qui met en prise trois France rivales, celle de Vichy, celle de Londres et celle d’Alger qui, après le débarquement Anglo-américain au Maroc et en Algérie le 8 novembre 1942, se refuse pendant plusieurs mois encore à l’autorité du général de Gaulle.

C’est aussi une année clé entre les partisans de la collaboration et la Résistance, des camps se forment plus clairement. L’opération « Torch », le débarquement Allié en AFN, a considérablement affaibli le régime de Vichy. En effet, dès le 11 novembre 1942, les Allemands envahissent la zone Sud et c’est donc la France entière qui est occupée. Le 27 novembre 1942, la flotte de guerre française se saborde à Toulon. L’armée d’armistice est désarmée.

En Afrique du Nord, à El Alamein, en Cyrénaïque, l’armée de Montgomery perce les lignes de l’Africa Corps de Rommel qui se repli vers la Tunisie. La « guerre du désert » est perdue pour les forces de l’Axe. En Russie, le général von Paulus (fait maréchal au cours de la bataille) échoue à Stalingrad. Il se rend le 2 février 1943 avec 90 000 hommes dont 24 généraux. Cette année-là, Vichy perd la plupart de ses atouts politiques. De vassalisée, la France devient satellisée.

Revenu aux affaires en avril 1942, Laval table toujours sur la victoire finale du Reich. L’occupant exige des Juifs, ce sera fait. Il lui faut également de la main-d’œuvre, 600 000 hommes seront astreints au STO (Service du Travail Obligatoire). Enfin, En janvier 1943, création de la Milice, qui sera dirigée par Joseph Darnand.

Un point positif pour la France combattante, le 26 janvier 1943, création des Murs (Mouvements Unis de la Résistance). Le 27 mai, Jean Moulin préside la première réunion du CNR (Conseil National de la Résistance) regroupant les huit principaux mouvements de la Résistance. Il faut noter que les villes cessent d’être des lieux exclusifs de la Résistance, la montée des maquis en secteur rural se fait jour. Avec la mobilisation de trois classes d’âge pour le STO, ce qui concerne aussi bien les villes que les campagnes, une partie des hommes concernés sont réfractaires. Parmi eux, 10 à 15 % seulement entrent dans les réseaux des maquis.

STO POUR LES CLASSES 1940, 1941, 1942

Mais les maquis marquent le pas à l’approche de l’hiver, pourtant, le long feuilleton de la querelle Giraud-de Gaulle prend fin à l’automne. De Gaulle vainqueur va s’opposer au « protectorat » américain instauré en Algérie. A partir du 3 novembre 1943, siège à Alger une Assemblée consultative, première réunion d’une Assemblée française depuis le vote des pleins pouvoirs à Pétain, le 10 juillet 1940.

La répression systématique menée par l’occupant va affaiblir les mouvements de résistance, car les maquis manquent cruellement d’armes. Armes et munitions parachutées en priorité en Yougoslavie, en Grèce et même en Italie. Anglais et surtout Américains, pensent que la Résistance en France compte peu, fournir des armes peut même s’avérer dangereux.

Le 13 novembre, sur ordre de Berlin, Pétain est interdit de radio et cessera d’exercer ses fonctions de chef de l’État français le 20 août 1944.

Contrairement à nos jours, il n’y a pas de sondage sur l’opinion publique du moment. On peut seulement être certain que la politique de collaboration et les violences de l’occupant et de la Milice, sont rejetées par une grande majorité de Français. La collaboration militaire est à l’ordre du jour avec la création de la LVF (Légion des Volontaires Français), puis de la Waffen-SS (Sturmbrigade SS Frankreich).

Le régime de Vichy n’a en réalité pas été très populaire, il n’a existé que grâce au prestige du Maréchal Pétain. Il n’a rencontré que l’assentiment résigné de l’opinion. On était reconnaissant au Maréchal d’avoir fait don de sa personne à la France.

A partir du 29 décembre 1943, date de la création des FFI (Forces Françaises de l’Intérieur) qui regroupe l’AS (Armée Secrète), l’ORA (Organisation de Résistance de l’Armée) et les FTP (Francs Tireurs et Partisans) communistes.

Fin 1943, le régime de Vichy est moribond, l’illusion d’agir sur le destin de la France est un fiasco. La stratégie de collaboration supposée atténuer les conséquences de l’occupation allemande et de garder une place de la France dans une Europe asservie, s’est traduit par une complicité dans l’horreur.

La création de la Milice par Laval, une force de propagande mais aussi d’action pour la lutte contre la Résistance qui sort de l’ombre. Par ses actions et ses crimes, la Milice échappe au contrôle de Laval et devient une force supplétive des nazis, transformant de fait leurs actions en guerre civile.

De l’autre côté de la Méditerranée,  l’armée d’Afrique, d’abord fidèle à Vichy, puis à Giraud, va faire sa jonction avec les Forces Françaises Libres du général de Gaulle. Ce qui fera renaître les armes de la France. A ce moment-là, il y avait 50 000 soldats des FFL (Force Françaises libres) dévoués à de Gaulle (la glorieuse « Force L » de Leclerc) qui combattaient Rommel aux côtés de l’armée Britannique de Montgomery. De l’autre, 120 000 hommes de l’armée française d’Afrique du Nord, fidèle à Vichy dès l’été 1940, ils se sont opposés au débarquement anglo-américain de 1942, sous la houlette de l’amiral Darlan, puis du général Giraud. Ils vont se rallier avec beaucoup de réticences et bien des officiers restent maréchalistes.

La « Force L » qui avait participé à la campagne de Tunisie en août 1943, est envoyée au Maroc.  De Gaulle désigne le général Leclerc pour mettre sur pied la 2ème Division blindée (2ème DB) entièrement équipée et instruite par les Américains.

En AFN, le général Alphonse Juin commande depuis  décembre 1941 toutes les troupes. Le débarquement anglo-américain va provoquer le revirement du général au profit des FFL ; les soldats de Leclerc le surnomment « Juin 40 » pour se moquer de lui. Leclerc va approuver le racolage des soldats de l’armée de Giraud, afin de quitter cette force compromise politiquement, pour rejoindre la « Force L ».

LECLERC, L’HOMME DU SERMENT DE KOUFRA

De Gaulle écrira dans ses Mémoires de guerre : « Le 14 juillet 1943, Alger devient la capitale de l’Empire et de la France combattante, qui offrit la démonstration de la renaissance de l’État et de l’unité nationale recouvré ».

Un mois plus tôt, le 3 juin, avait été créé le Comité français de libération nationale (CFLN), coprésidé par de Gaulle et Giraud.  C’était l’aboutissement de six mois de négociation difficiles entre les deux généraux.

Un autre évènement en été 1943, la mise sur pied d’une commission d’épuration qui aura pour mission d’enquêter sur les élus, les fonctionnaires et les agents publics qui ont : « …par leurs actes, leurs écrits ou leur attitude personnelle, soit favorisé les entreprises de l’ennemi, soit nui à l’action des nations unies et des Français résistants, soit porté atteinte aux institutions constitutionnelles et aux libertés publiques fondamentales ». Il est aussi décidé de poursuivre en justice Pétain et son gouvernement, ainsi que ceux qui ont collaboré avec l’ennemi en France métropolitaine et dans l’empire.

Sur les 103 sièges que compte l’Assemblée, notons que pour la première fois de l’histoire, siège une femme, Marthe Simard, représentante de la Résistance extérieur.

Le CFLN va accomplir une œuvre considérable, 400 ordonnances ont été publiées au Journal Officiel de la République, ce qui permettra d’empêcher, à la Libération, la mise en place d’une administration militaire américaine (l’AMGOT).

JOURNAL LA DÉPÊCHE ALGÉRIENNE DU 04.06.43

LES MEMBRES DU CFLN À ALGER EN NOVEMBRE 1943

MARTHE SIMARD

Ce n’est pas encore la fin de la guerre, mais la République est ressuscitée.