LE TRAIN DE PERMISSIONNAIRES FONCE VERS LA MORT

Après la défaite italienne lors de la bataille de Caporetto, le 24 octobre 1917, le corps expéditionnaire franco-britannique, avec 120 000 hommes, vient renforcer le front italien. Un mois plus tard, la situation est stabilisée. Le général Fayolle qui commande les troupes françaises en Italie, accorde des permissions à ses soldats.

La Direction des transports militaires aux armées (DTMA) va organiser le transport ferroviaire pour acheminer les permissionnaires de Vicence (Italie) jusqu’à Lyon et à Chagny en Saône-et-Loire.

Le train qui quitte la ville italienne de Bassano del Grappa (au N-E de Vicence) le 11 décembre 1917, emporte 1200 soldats français dans 17 voitures. Le 12 décembre, le train arrive à Turin et prend la direction du tunnel de Fréjus via la vallée de Suse. La longueur du train (350 m) et son tonnage (530 t) fait que le train est scindé en deux afin de pouvoir gravir les pentes qui mènent au tunnel. Les deux rames gagnent séparément la gare de Modane où elles sont rattachées pour constituer le train PLM ML 3874. À 22 H 47, le train de permissionnaires quitte Modane en direction de Chambéry.

Toutes les voitures disposent d’un système de freinage automatique et d’un système manuel. Mais seul le fourgon de tête et les deux premières voitures restent activés, le système de freinage est désactivé sur le reste de la rame. Sept garde-freins sont alors répartis sur les wagons désactivés pour assurer un freinage manuel.

Entre la gare de Modane et de Saint-Michel-de-Maurienne, le dénivelé moyen de la ligne est de 346 m sur une distance de 15,59 km, soit 22 %. Le dénivelé est même de 30 % à certains endroits.

PROFIL DU DÉNIVELÉ DE LA LIGNE SAINT-MICHEL-de-MAURIENNE ET MODANE

Le train quitte la gare de Modane à 22 H 47. Peu après Modane, à partir de Freney, le train prend de la vitesse. Il devient bientôt incontrôlable et arrive à la vitesse de 135 km/h puis 150 km/h entre Orelle et Saint-Michel-de-Maurienne. L’accident devient inévitable.

Le conducteur de la locomotive, Girard, actionne le sifflet pour alerter les serre-freins (personnels prévus pour actionner manuellement les freins), mais la vitesse est trop grande et la pente trop forte. Le train déraille peu avant  la gare de Saint-Michel et s’écrase contre un mur de soutènement. Girard s’en sort en sautant à l’entrée de la gare. Les wagons en bois sont encastrés les uns dans les autres et prennent feu. L’incendie ne sera maîtrisé que le lendemain soir.

Après le déraillement et l’incendie

Opérations de déblaiement

Il faut noter que le chef de gare de La Praz, voyant passer le train à trop grande allure, a averti la gare de Saint-Jean-de-Maurienne pour retarder le départ d’un train de soldats écossais afin d’éviter une autre catastrophe.

Il y avait à ce moment-là, à la gare de Saint-Michel, des soldats écossais qui attendaient leur départ pour Modane. Girard, les écossais ainsi que les employés des deux gares les plus proches, se rendent immédiatement sur les lieux du drame pour tenter de porter secours.

C’est un enchevêtrement de ferrailles, des wagons en flamme, de blessés et des morts qu’ils vont découvrir. Il faudra attendre que le jour se lève pour transférer les blessés à l’hôpital de Modane et de Saint-Michel-de-Maurienne. Cinq jours seront nécessaires pour retrouver tous les corps.

425 morts dont seulement 128 seront identifiés, des centaines de blessés. Sur les 1200 permissionnaires, 183 valides répondent à l’appel le lendemain de la catastrophe. Les corps seront inhumés au cimetière de Saint-Michel-de-Maurienne où un monument sera érigé en 1923. En 1962, ils sont transférés au cimetière militaire de La Doua à Villeurbanne. Enfin, en 1998, une stèle sera érigée sur les lieux de la catastrophe. Au final, cet accident aura coûté la vie à plus de 675 soldats.

À la fin des recherches de la première journée, le bilan provisoire est alors :

  • 350 rescapés
  • 207 blessés
  • 148 morts identifiés
  • 277 morts non-identifiés

« Anastasie », la censure militaire

De l’amas de ferraille, 424 corps furent retirés et officiellement identifiés ; 135 autres ne le seront pas. 37 corps seront également retrouvés le long de la voie entre La Praz et le pont de fer, des soldats qui ont sauté du train fou.

Cet accident est resté classé secret militaire pendant de nombreuses années après la fin de la guerre.

Cet accident reste la catastrophe ferroviaire la plus meurtrière survenue en France.

Stèle  sur les lieux de l’accident (1998)

Monument de Saint-Michel-de-Maurienne (1923)                         

Cet accident est la catastrophe ferroviaire la plus meurtrière survenue en France.

Carte de France des victimes de l’accident ferroviaire.