LES NOUVELLES AVENTURES DE DUR ET TIC

Les nouvelles aventures de Dur et Tic, fils de Lucie Ditais et de Thermo Lactile, son mari, dit le Grec.

Dur et Tic 1Une fois de plus, nos deux garnements se sont Ă©chappĂ©s de la ferme familiale pour errer dans les bois. MalgrĂ© les menaces du pĂšre, malgrĂ© les colĂšres de la mĂšre, Dur et Tic passent outre et partent Ă  la « chasse » des monstres de la forĂȘt.

Eh oui ! Dans leurs tĂȘtes, l’imagination ne fait pas dĂ©faut ; ils s’inventent des histoires de chevaliers qui combattentDur et Tic 2 les monstres des bois. Mais les monstres sont nombreux ; il faut donc des chevaliers pour les aider.

Ce seront les chevaliers du ChĂȘne aux feuilles d’or. Sir Harry Covert, l’Anglais, en sera le chef et il sera secondĂ© par sir Encaustic, un preux Celte. L’abbĂ© Quille sera leur aumĂŽnier, que remplace de temps en temps le PĂšre Iodik venu de la lointaine SuĂšde. Ils ne seront pas de trop pour venir Ă  bout des monstres de la forĂȘt.

Donc, un jour de fugue, les voici dans les bois. La densitĂ© des feuillages est telle, et les arbres sont si grands, que la lumiĂšre du jour filtre Ă  peine Ă  travers la vĂ©gĂ©tation. Un lĂ©ger vent fait frissonner les branchages et grincer le bois mort des arbres. Ponctuellement, le cri d’un animal se fait entendre ; peut ĂȘtre un appel de dĂ©tresse. La pauvre bĂȘte se fait sans doute attaquer par plus gros que lui
c’est peut ĂȘtre aussi une mĂšre qui tente de rassembler ses petits
 Des sifflements, des cris d’animaux inconnus et parfois des silences inquiĂ©tants. Il se passe mille choses autour de nos deux chenapans. Sous leurs pas, des brindilles qui craquent, quelques insectes sautent au large pour Ă©viter les semelles des souliers de Dur et Tic. Autour d’eux, ça bouge, ça saute, des bruits de course d’un animal invisible dans les buissons, peut ĂȘtre un de ces petits monstres, peut ĂȘtre aussi un lutin ou un gĂ©nie de la forĂȘt. Pour les deux fugitifs, l’inquiĂ©tude rend les mains moites, le souffle court. L’oreille est aux aguets et la tension est vive. BientĂŽt, au fin fond des bois, Dur et Tic s’attendent Ă  voir surgir un de ces monstres difformes, mangeurs d’enfants, crachant sa bave gluante sur sa future proie.

DerriĂšre chaque arbre, Dur et Tic 3aux formes monstrueuses, se cache certainement une de ces crĂ©atures. Dur et Tic les entendent respirer bruyamment, reniflant l’odeur de la chair de leurs futures victimes. Avec le jeu des lumiĂšres et des ombres, les arbres de la forĂȘt changent d’aspect en permanence et il semble que les branches deviennent des bras prĂȘts Ă  saisir ceux qui passent Ă  proximitĂ©. Les troncs noueux s’animent et se transforment en gueules bĂ©antes, capables d’avaler en entier une proie malheureuse. La gorge nouĂ©e par la peur, nos deux lascars continuent nĂ©anmoins Ă  pĂ©nĂ©trer dans la forĂȘt. Il faut ĂȘtre fort, la peur ne doit pas gagner, d’ailleurs les chevaliers vont arriver Ă  leur secours. Sir Harry Covert et ses compagnons sont Ă  portĂ©e de voix et les monstres n’ont qu’à bien se tenir.

Dur et Tic 4

En attendant, d’autres animaux de la forĂȘt font leur apparition ; lĂ©zards, abeilles, criquets, Ă©cureuils, grenouilles, scarabĂ©es


Dur et Tic 5

Mais qui dans l’esprit de Dur et Tic se transforment en petits monstres


Dur et Tic 6

MalgrĂ© la peur, nos deux lascars continuent Ă  s’enfoncer dans les bois. Nombreuses Ă©taient les lĂ©gendes qui se racontaient sur la forĂȘt magique. On disait par exemple que les racines des arbres Ă©taient reliĂ©es entre elles comme un rĂ©seau tĂ©lĂ©phonique. La transmission se faisait donc d’un bout Ă  l’autre de la forĂȘt et malheur Ă  celui qui s’aventurait trop loin. On disait aussi que la forĂȘt Ă©tait dotĂ©e d’une forme d’intelligence ; on dit qu’un jour le vieux forgeron du village avait cru bon de scier une branche d’un arbre encore debout. La forĂȘt, alors, Ă©tait devenue trĂšs menaçante tout autour de lui. Les feuilles se sont soudainement mises Ă  trembler, les branches se sont ployĂ©es en direction du forgeron comme pour le saisir et l’empĂȘcher de continuer son Ɠuvre destructrice
La forĂȘt ne plaisante pas avec les intrus. Depuis, au village, les habitants ne ramassent que le bois mort qui jonche le sol et restent sur les chemins pour ne pas blesser les arbres et les plantes des bois.

Dur et Tic 7Les animaux, eux, sont sous la protection de la forĂȘt ; rien ne peut arriver de fĂącheux si les rĂšgles sont bien respectĂ©es. Aussi, pour Ă©viter les chasseurs et autres braconniers, liĂšvres, cerfs, biches, sangliers, pigeons ramiers
restent sagement prĂšs de leurs parents et ne s’aventurent pas au-delĂ  de la lisiĂšre des bois. Pourtant, la pitance se fait rare en hiver, mais le danger est si grand que mĂȘme la faim ne fait pas perdre raison. Comme chez les humains, il y a bien quelques petits dĂ©sobĂ©issants qui s’aventurent prĂšs des demeures du village ; certains n’en sont jamais revenus et ont fini en civet dans une grande marmite. Une rĂ©galade pour le villageois carnivore qui savoure ce met avec dĂ©lectation. Si Dur et Tic savaient que les ogres mangent Ă©galement les enfants rebelles aux recommandations de leurs parents et que les ogres vivent toujours dans des maisons lugubres au fond des forĂȘts, ils ne s’aventureraient plus aussi loin du village.

Nous sommes dĂ©jĂ  au milieu de l’aprĂšs-midi ; Dur et Tic ne se rendent pas compte que le soleil dĂ©cline Ă  l’horizon. En effet, l’épaisseur de la forĂȘt empĂȘche d’apprĂ©cier l’heure rĂ©elle de la journĂ©e ; dans cette semi obscuritĂ©, il est difficile de savoir l’heure. La seule horloge, c’est l’estomac. La faim remettra les choses en place et quand ce moment sera venu, il sera peut-ĂȘtre dĂ©jĂ  trop tard. Pour l’instant, ils s’amusent.

  • Holà ! Chevaliers, Ă  moi. Gardez-vous Ă  droite ! Gardez-vous Ă  gauche ! L’ennemi nous encercle, dit Dur.
  • Ne pas faiblir, attaquez ! Attaquez ces monstres hideux, rĂ©plique Tic.
  • Nous vaincrons !

Les enfants se rendirent compte alors que les bruits de la forĂȘt avaient changĂ©. La voĂ»te de feuillages Ă©tait plus sombre, les rayons de soleil qui filtraient par-ci, par-lĂ , avaient disparu subitement. Une chouette poussa son premier hululement ;

  • Hou ! Hou !

Un frisson parcourt le dos de Dur et Tic. La crainte s’installe. La rĂ©alitĂ© des choses reprend le dessus.

  • Dur, j’ai peur.
  • Moi aussi petit frĂšre.
  • OĂč sommes-nous ?

Cette fois les dĂ©s sont jetĂ©s, ils sont bel et bien perdus, la nuit tombe rapidement et dans l’obscuritĂ© qui s’installe les deux garçons n’ont plus de repaires pour s’orienter. Ils ont froid, ils ont faim, ils ont surtout peur. Plus question de preux chevaliers, de monstres et de lutins ; cette fois-ci c’est du rĂ©el. La nuit, la peur, la faim, maintenant ils pensent Ă  leurs parents
un peu tard. Les voici tous les deux, assis Ă  mĂȘme le sol humide, en sanglots ;

  • Maman ! Papa !
  • Au secours
 !

Cela faisait maintenant plus de deux heures que les deux garnements tremblaient de peur dans cette forĂȘt quand soudain
Des voix ; des lumiĂšres qui vacillent entre les arbres


  • Dur ! Tic ! OĂč ĂȘtes-vous ?
  • Holà ! Holà ! Les enfants

  • Nous sommes là
Au secours ! Nous sommes là !

Les lumiĂšres se rapprochent
C’est le pĂšre avec les hommes du village. L’homme est soulagĂ© de retrouver ses enfants, mais un petit instant seulement. Il fait des gros yeux maintenant et promet le martinet dĂšs le retour Ă  la maison. Sur le chemin du retour, le pĂšre serre trĂšs fort la main de ses garçons, la peur sans doute de les perdre dans cette forĂȘt sombre. La colĂšre a fait place au bonheur des retrouvailles.

Ceci est un conte de « faits », racontĂ© par papy Moustache…

Bonneuuu nuit !