Léon et Thomas, deux wallisiens, sont les petits copains de Sidney. Ensemble, ils vont dans la même école, jouent dans la cour les mêmes jeux. Il arrive souvent que les deux garçons se retrouvent à Mont Dore chez les parents de Sidney.
Un jour, Michel, le papa de Sidney, propose aux garçons de faire une visite au zoo de Montravel, histoire de faire une rencontre avec la nature et les animaux. Et puis, ce sera une sortie également pour Lilian, le frère de Sidney. En effet, le zoo possède des centaines d’animaux, originaires pour la plupart de la Grande Terre, mais aussi de la région Asie Polynésie Australie. C’est une leçon de chose en direct avec la nature, il y a plusieurs kilomètres de chemins qui serpentent dans le parc, au milieu d’une végétation luxuriante, trois petits lacs, des cris des animaux, dont certains sont en liberté. Un véritable spectacle. Une aventure… presque.
Le papa de Sidney met en garde nos petits chenapans :
- Attention les enfants ; vous restez bien groupé, personne ne s’écarte des chemins. Il y a des animaux sauvages mais aussi une vieille et vilaine sorcière qui rôde dans les parages et qui attrape les enfants perdus.
- Oui papa !
- Oui monsieur !
- Bien ! Allez ! tout le monde en voiture…ça roule…
Les enfants grimpent dans la voiture, les deux wallisiens, Léon et Thomas, mettent leur ceinture comme des grands ; ils savent que c’est obligatoire mais aussi qu’en cas de danger ce petit bout de tissu peut leur sauver la vie ou éviter de graves blessures. Sidney prend place à côté de son papa, non sans avoir vérifié si son frère Lilian est bien installé entre les deux gros patapouffes que sont Léon et Thomas. Comme tous les wallisiens, ils sont déjà taillés pour faire du rugby ; ils n’ont que quatre ans.
Enfin le parking…le guichet d’entrée…les premiers mètres de piste.
- Attention les enfants ! Personne ne s’éloigne du chemin. N’oubliez pas la vilaine sorcière.
Durant le trajet pour se rendre au zoo, Michel, le papa, a raconté comment, au cours des dernières vacances, la sorcière avait kidnappé une petite fille qui avait désobéi à ses parents. La méchante femme s’appelle dans la langue locale, Awii Délé Apulip, ce qui veut dire « Celle qui mange les déchets des gens ». Elle va noyer les enfants qu’elle capture et mange les chaussures, les vêtements et même le goûter de l’école, et même le cartable. Les parents sont bien tristes de ne rien retrouver de leurs enfants.
Pendant toute la durée du récit, les quatre garçons écoutaient, les yeux grands ouverts et la bouche en forme de O ;
- Dis papa ! Tu l’as déjà rencontré la sorcière ?
- Oh ! Oui. Quand nous sommes arrivés de Marseille, elle était au bout de la rue pour voir qui étaient ces nouveaux arrivants et s’ils avaient des enfants.
Plus personne ne parla dans la voiture durant le reste du trajet.
Le parc forestier du mont Montravel est vraiment superbe. Il surplombe Nouméa et la vue sur le lagon et la côte sud de la Grande Terre est magnifique. L’aventure de la découverte commence.
Ils avaient à peine fait une cinquantaine de mètres quand, dans un vrombissement d’ailes, quelque chose passa au-dessus de leurs têtes. Les enfants avaient encore l’histoire de la sorcière en mémoire ; tous se rapprochent du papa de Lilian et de Sidney.
- C’est quoi ce bruit monsieur ? Interroge Thomas inquiet.
- Ce n’est qu’un notou ; le plus gros pigeon du monde…Regardez ! Le voilà !
Les têtes se tournent vers le « monstre » emplumé. Il se distingue à peine avec son plumage gris ardoisé, mais son bec rouge le trahit lorsqu’il bouge sa tête. Ils arrivent près des volières, autruches, émeus d’Australie, flamants roses, ibis rouges, perroquets multicolores calao trompette…C’est un jardin extraordinaire qu’ils ont devant les yeux.
- Dis papa, toi qui sais tout…pourquoi les flamands sont roses ?
- C’est la nourriture qui donne la couleur rose ; ils mangent beaucoup de crevettes dans lesquelles se trouve un produit, la bêta carotène, c’est ça qui donne cette couleur rose.
- C’est quoi ces carottes bêtes ? demande Léon.
- Bêta carotène, c’est dans les crevettes, pas les carottes, rectifie Michel.
Puis ce sont les singes, ils sautent d’un endroit à un autre, se chamaillent un instant avec l’un avant de pourchasser un autre qui se réfugie au plus haut d’une branche.
- Vous avez vu ça les enfants…toujours en train de faire des bêtises…comme vous.
Puis des roussettes ou renard-volant, ils sont très nombreux, pendues par leurs pattes aux branches et au grillage, la tête en bas, ils observent les visiteurs avec leurs grands yeux globuleux.
- Ils doivent avoir très mal à la tête le soir, toujours vivre la tête en bas…remarque Léon.
- Mais non, reprend Thomas, la nuit ils volent comme les oiseaux…Hein ! Que c’est vrai monsieur ?
- C’est presque vrai.
Nos quatre petits explorateurs poursuivent leur visite du parc. Soudain, un peu en retrait du chemin, une forme se dessine sur un banc. Cela semble être une vieille dame. Léon, Thomas et Sidney qui marchent en avant du groupe, ne se rendent pas compte que le papa est resté en arrière devant un enclos grillagé, il donne quelques explications à son petit Lilian. Maintenant, nos trois chenapans, voient très bien les traits de la vieille femme.
Elle est vraiment très vieille, mais aussi très laide. Maigre, voûtée, elle a une chevelure longue et grise qui pend sur ses frêles épaules. Son visage semble avoir été taillé à coup de serpe, ridé, l’œil humide, un nez fin et anormalement long et crochu. Au milieu de son nez, une grosse verrue pleine de poils, et des trous de nez suffisamment grand pour servir de nid à un couple de tourterelles. Brrrrrr ! Qu’elle est laide. Les enfants marquent un temps d’arrêt.
- Bonjour les enfants ! Dit la vieille d’une voix chevrotante. Approchez…Venez !
Les enfants, méfiants, avancent néanmoins.
- Bonjour madame ! dit Sidney.
- Rrrrrr ! Bonjour mon petit rrrrrr !
Thomas et Léon sont un peu en retrait, restant sur leurs gardes. Mais la vieille femme use de charmes maléfiques pour attirer les garçons.
- Approchez les enfants ! Je vais vous montrer un tour de magie. L’un de vous va disparaître et je sais même le faire réapparaître.
Sidney et Thomas ne se rendent pas compte que le pauvre Léon avait disparu, volatilisé, transformé en je ne sais quoi…
- Hé, hé, hé, hé ! Où est votre copain ? Hé, hé, hé, hé !
- Vilaine sorcière ! Je n’ai pas peur de toi. Dit Sidney en colère. Fais revenir notre ami.
- …Seulement si vous jouez avec moi un instant, dit la sorcière.
- T’es même pas capable de te transformer en…en…girafe.
- Tu crois ça mon petit…
Un énorme nuage enveloppe la vieille et au bout d’un court instant, apparaît une girafe au long cou.
- Alors, petits garnements, je ne suis pas capable ? Dit la girafe…la sorcière.
- Ouais ! Répond Sidney. Tu crois qu’une si grande girafe peut se transformer en escargot ?
Nouveau nuage de poussière…La girafe disparaît. A la place, sur le sol, un minuscule petit escargots qui rampe vers les enfants.
- Alors ! Convaincu maintenant !
Sidney, d’un seul élan, écrase le gastéropode sous la semelle de sa chaussure. Une ridicule petite plainte s’échappe de la coquille aplatie.
- Et maintenant ! C’est qui le plus fort ?
Mais où est passé L’ami Léon ?
- Léon ! Léon ! Reprennent en cœur les deux garçons.
Un paon bleu, avec un magnifique plumage passe par là et cri à son tour ;
- Êêêêléééooonnn ! Êêêêléééooonnn !
C’était le pauvre Léon ; la vilaine sorcière l’avait transformé en paon qui ne savait dire qu’un mot : « Êêêléééooonnn », son prénom. Un nouveau nuage enveloppa le paon…pour laisser apparaître l’ami Léon, vert de peur. Le mauvais sort de la vieille sorcière avait disparu.
- Ohé ! Les enfants…Où êtes-vous ?
C’est le papa de Sidney qui arrive avec Lilian.