HISTOIRE DU MAROC

Le Maroc dans la préhistoire.

Les outils retrouvés à Casablanca attestent la présence de l’homme vers 800 000 avant J.C.. De nouvelles populations viendront cohabiter et se mêler aux descendants des premiers habitants du Maroc, environ 5 000 ans avant J.C. ; ils arriveront de tout le Bassin méditerranéen, d’Europe, du Proche-Orient, de Nubie. C’est par le même phénomène migratoire que dans d’autres parties du monde, comme en France par exemple, les invasions successives venant de l’Est sont venues se heurter à l’océan et nombre de migrants ont fait souche, Huns, Wisigoths, Francs, et ces derniers ont donné le nom au pays. Le Maroc, comme la France, se trouve à l’extrême Ouest de son continent, invasions et migrations ont provoqué le brassage de la population.

A l’âge de bronze, vers 1 600 avant J.C., les Berbères gravent dans les roches du Haut-Atlas, des dessins d’armes de chasse. Ils inventent l’écriture libyque, ancêtre du tifinagh (toujours conservé par les Touaregs) aussi appelée tamazight. Avec l’écriture, la civilisation Berbère fait entrer le Maroc dans le Monde. Au XI° s. avant J.C., les Phéniciens s’installent sur les côtes marocaines ; au VI° s. avant J.C., les Carthaginois installent des comptoirs. Vers 500 après J.C., les Vandales étendent leur royaume de la Tunisie actuelle jusqu’au Nord du Maroc. Les Éthiopiens, « ceux qui sont brûlés par le soleil », s’installent à leur tour au Maroc. Les Atlantes, quand à eux, s’installent au centre de l’Atlas et donnent leur nom à l’Océan Atlantique.

 berberes-carteLes Berbères en Afrique du Nord.

Du royaume berbère au Maroc des Romains.

Les premiers hommes sur lesquels nous avons des renseignements parlaient le berbère. En 814 avant J.C., après la fondation de Carthage, les marchands puniques avaient installé des comptoirs à ce qui est aujourd’hui Essaouira. C’est vers la fin du III° s. avant J.C., que les Berbères, ayant subi une forte influence punique, s’organisèrent en monarchie, les rois étant des chefs de guerre.

Juba I, roi de Numidie de 68 à 46 avant J.C., eut le grand tort de prendre le parti de Pompée lors de sa révolte contre César. Il fut battu par ce dernier à Thapsus (à l’Est de la Tunisie actuelle) en 46, et il se suicida. Son fils Juba II, alors âgé de cinq ans fut emmené captif à Rome où César le présenta à la foule comme signe de son triomphe.

Sous la domination de Rome, durant deux siècles, l’ancien royaume berbère de l’Ouest marocain prend le nom de Maurétanie Tingitane, du nom de sa capitale Tingis (Tanger), et pour distinguer cette région de sa voisine, la Maurétanie Césarienne dont la principale ville était Césarée, aujourd’hui Cherchell.

mauretanie tingitane

Bien plus réduite que le Maroc actuel, la Tingitane était limitée au Nord par la Méditerranée, à l’Ouest par l’Atlantique et au Sud par l’Oued Bou Regreg. A l’Est, aucune trace ne permet de dire avec certitude que les deux Maurétanies possédaient une frontière commune. (Il faut bien dire Maurétanie et non Mauritanie qui est un pays des temps modernes). Tantôt uni, tantôt séparé, l’Est et l’Ouest développa une civilisation originale, mais mal connue. Sa prospérité attirait, si bien que Rome en fit deux provinces.

A partir de ce moment, les Maurétanies vont bénéficier de la « pax romana ». Il est vrai aussi, que les Berbères, dorénavant appelés Maures, provoquèrent des troubles et des insurrections tout au long du II° siècle. Invariablement, les négociations se terminaient par un accord et l’érection d’un autel de la Paix. Les Maures furent associés à la gestion et à la prospérité de la région ; la province se couvrit de villes, preuve de l’enrichissement. Immigrés et Maures, liés les uns aux autres par le mariage, les cités deviennent des lieux de paix, de justice, de commerce…Volubilis, Tanger, Benasa, Lixus…

 Volubilis Volubilis

La prospérité reposait sur l’exploitation des richesses de la mer et de la terre. Pour la petite Histoire, la Tingitane était réputée pour sa production de garum, une saumure de poisson très prisée comme condiment et largement exportée (le garum consistait en une macération de viscères de poissons  comme le nuoc-mâm du Sud-est asiatique). La Tingitane fournissait également, à Rome, des fauves pour les arènes dans toutes le Bassin méditerranéen, des bois de luxe. Cette richesse attirait de nombreux étrangers, une colonie juive, établie à Volubilis, eut sa synagogue.

Les cultes païens avaient cours dans toutes les cités, mais une nouvelle religion fit son apparition ; le christianisme. Aux environs de l’an 295, à Tanger, le centurion Marcellus fut martyrisé parce qu’il refusait le culte païen obligatoire ainsi que le culte impérial. Au moment du déclin de Rome, surgit une nouvelle invasion ; les Germains. Ayant franchi le Rhin en décembre 406, ils se répandent dans toute la Gaule, gagnèrent le Sud-ouest puis l’Espagne. Au cours du mois de mai 429, certains d’entre eux, les Vandales, traversent le détroit de Gibraltar. Le roi Genséric, avec 80 000 hommes et leurs familles, envahissait l’Afrique. Après un cours passage en Tingitane, les Vandales continuèrent leur chemin vers l’Est, pour arriver à Carthage en 439. La période romaine avait vécu, un autre monde va lui succéder, l’Occident barbare.

Après le passage des Vandales, la Tingitane resta sans aucune autorité autre que locale. Isolée géographiquement, sans commerces extérieurs, l’affaiblissement entraîna un appauvrissement de la population. Ni les Vandales de Carthage, ni les Wisigoths d’Espagne, n’employaient beaucoup d’énergie pour occuper le pays. Les Byzantins vont combler ce vide en installant leur autorité à partir de 534. Ils se heurtèrent à l’autorité d’un prince Berbère appelé Garmel, ainsi qu’aux ambitions des Wisigoths d’Espagne. La romanisation, c’est-à-dire, la langue, le droit, les coutumes, connue un certain déclin. L’économie suivit le même chemin.

Pendant longtemps, la romanisation constitua un ensemble de valeurs allant de paire avec l’urbanisation et la culture. La rupture se fera aux moments de la conquête arabes, qui imposèrent par les armes leur langue et leur religion. Comme souvent, ils durent faire face à des révoltes ; les Byzantins avaient essaimé des églises dans le pays (Aghmat, Ribat Chakir…) mais la christianisation n’a touché que les villes ; les campagnes sont restées juives ou païennes. De même que le Maroc romain avait cédé la place au Maroc romanisé, le Maroc romanisé devait s’effacer devant le Maroc musulman.

Juba II un roi pas comme les autres. 

-Juba_II.

Avant d’aller plus en avant dans notre Histoire, il faut rendre un hommage particulier à Juba II ; roi berbère de la Maurétanie. Son royaume s’étendait de l’actuel Maroc, en passant par le Nord de l’Algérie, jusqu’aux frontières de la Tunisie actuelle.

Après la défaite de son père, Juba I, son fils à peine âgé de cinq ans, part en captivité à Rome. Au triomphe de César, il est présenté à la foule derrière Vercingétorix et Arsinoé, la sœur de Cléopâtre d’Egypte. Captivité dorée pour Juba II car élevé par Octavie, la sœur d’Octave, le futur empereur Auguste. Rapidement, il attira l’amitié de son protecteur qui lui offrit les occasions de se distinguer et de s’élever au même rang que les autres princes. Il participa à la campagne contre Marc Antoine et Cléopâtre, de 31 à 29, puis à celle d’Espagne de 26 à 25 où Octave l’apprécia pour sa fidélité et son adresse. A son retour d’Espagne, il reçut en récompense ce qui restait du royaume de son père et une partie des Etats de Bocchus et Bogud.

En 19 av. JC, à la 6° année de son règne, il épousa Cléopâtre Séléné, fille de Cléopâtre, reine d’Egypte, et de Marc Antoine. Elevée, comme Juba II, par Octavie, l’épouse répudiée de Marc Antoine et sœur d’Octave, Cléopâtre Séléné fut couronnée à son tour.

Le royaume de Juba II s’étendait de l’Atlantique, à l’Ouest, à l’embouchure de l’Ampsaga (oued el Kébir) à l’Est, la région de Sétif et les territoires des Gétules du Sud-est algérien et de Tunisie. Ce vaste royaume restera sous la tutelle de Rome et Juba II en sera le « gérant » et profitera de l’usufruit de ses territoires. De part son éducation, il ne s’opposera pas à Rome, mais n’oublia pas ses origines berbères.

Juba II va se consacrer à l’étude de l’écriture libyque et du punique, langues de culture de ses ancêtres. Très rapidement, il acquit dans les sciences et les lettres, une grande réputation. Grand constructeur, il fit construire de nombreux édifices publics, des forums, des théâtres, des thermes, des temples, des jardins publics….Il possédait une très grande capacité de travail et d’assimilation et bien que le temps ait effacé les traces de son œuvre, les écrivains grecs et latins ont puisé de nombreuses documentations dans la richesse de ses écrits. Il expédiait de nombreux copistes dans les capitales du monde civilisé, toujours à la recherche des nouvelles pensées et des découvertes. Il organisa des expéditions pour étudier l’archipel de Canaris, ou encore pour découvrir la source du Nil. Il écrivit un traité sur son pays natal, intitulé Libuca, en trois volumes comprenant la géographie, l’histoire, l’histoire naturelle, la mythologie, les croyances…Il transmit également des écrits sur les Assyriens, l’Arabie, les plantes, l’Histoire romaine…

Très connu en tant que savant, artiste, hommes de lettres, auteur de plusieurs traités sur l’histoire, la peinture, la géographie et la médecine ; il est à l’origine de la découverte de l’euphorbe, à laquelle il a donné ce nom, qui était celui de son médecin personnel. Son traité sur l’euphorbe inspira plusieurs médecins grecs. Tite-Live, Alexandre de Milet, Diodore de Sicile, Pline l’Ancien ont fait référence des écrits de Juba II. Les Grecs lui érigèrent une statue près de la bibliothèque de Ptolémée à Pausanias. Son règne fut marqué par un grand sens de la démocratie.

Son épouse Cléopâtre Séléné, Egyptienne, désirait et obtint de Juba, qu’ils soient tous deux ensevelis dans un édifice funéraire semblable aux pyramides. Ce qui amena le roi à faire construire ce tombeau, proche de Tipaza (Algérie), appelé de nos jours et à tort, le Tombeau de la Chrétienté. Cette erreur provient d’une erreur de traduction des Français, à l’époque coloniale. L’impériale épouse, très aimée par le peuple, envers lequel elle se dévouait sans compter, était surnommée « la Romaine ». Après la mort de Séléné, la population locale dénommait le mausolée  « le Tombeau de la Romaine ». Le traducteur français a confondu en une seule et même signification Roumi, qui veut dire Romain, ou Roumia qui veut dire Romaine, avec chrétien et chrétienne. Avec un peu plus de connaissance historique, le traducteur aurait constaté que les chrétiens, à l’époque, n’avaient pas dépassé les limites de la Palestine. Ils n’arriveront en pays berbère que bien plus tard.

 tombeau-de-la-chretiente

Mausolée Royal de Maurétanie dit Tombeau de la Chrétienté

  monnaie JubaII Pièce de monnaie à l’effigie de Juba II

 Ptolemée  Ptolémée de Maurétanie. 

Fils de Juba II et de Cléopâtre Séléné, Ptolémée succéda à son père à la mort de ce dernier et régna, de 23 à 40, sur la Maurétanie. Petit fils de Cléopâtre et de Marc Antoine et du roi de Numidie, Juba I, il avait donc un héritage à la fois africain, grec et romain. Avec sa sœur Drusilla, il avait bénéficié d’une éducation romaine. En l’an 19, son père le nomme co-monarque ; quand quatre ans plus tard Juba II meurt, il monte sur le trône.

Loin d’avoir l’érudition de son père, il était néanmoins un bon guerrier. Il met fin à la révolte des Garamantes et du mercenaire Tacfarinas. Pour cette victoire, il obtiendra du Sénat romain, un sceptre en ivoire et une tunique de triomphe et la reconnaissance comme roi et ami de Rome. Il épousa Julia Urania, probablement membre de la famille royale d’Emèse. Une fille unique va naître de cette union vers 37-39. Elle épousera Antoine Félix, procurateur de Judée, en 52.

En 40, il est l’invité de Caligula, à Rome. Ptolémée suscite la colère de ce dernier en portant un manteau de pourpre, couleur impériale. Alors qu’il se rend à Lyon, il est fait prisonnier et pendu, après avoir appris que son royaume sera annexé par Rome. Son royaume est partagé en deux provinces, Maurétanie Césarienne et Maurétanie Tingitane. Les Berbères se soulevèrent contre Rome, après deux années de luttes, ne pouvant surveiller ce vaste territoire, les Romains se cantonnèrent dans le Nord du Maroc actuel, en l’an 42. Les Berbères du Rif et de l’Atlas conservent leur indépendance. Sous le règne de Dioclétien, Tanger et sa région, sera rattachée à l’Espagne méridionale (285). Ptolémée aura été le dernier roi de Maurétanie.

 Souverains de Maurétanie.

 Bocchus

Bogud ou Bogudes

Bocchus II

Juba I  (Numidie orientale)

Juba II  (52 av. JC à 23 ap. JC)

Ptolémée de Maurétanie (23 à 40)

Fin de la période romaine.

Traditionnellement, les historiens datent la fin de l’Empire romain le 4 septembre 476, au moment où le dernier empereur de l’Empire romain d’Occident, Romulus Augustule est déposé par Odoacre et que ses insignes sont envoyés à Byzance. Ce geste marque la fin de l’Empire d’Occident. L’Empire romain d’Occident n’est plus ; il est remplacé par une mosaïque de royaumes barbares.

 chute empire romeLa chute de l’Occident est perceptible, les grandes invasions ont ravagé l’ouest de l’Empire romain.

 

Invasion des Vandales.

Après avoir traversé toute l’Europe, pillé la Gaule et l’Espagne, les Vandales associés aux Alains, dans leur soif de conquête, vont traverser le détroit de Gibraltar et envahir l’Afrique du Nord.

 Grandes_Invasions_Empire_romain

En 428, Genséric devient roi des Vandales et des Alains, succédant à son demi-frère Gundéric. Probablement attiré par les richesses de l’Afrique du Nord romaine, encore épargné par les Barbares. Genséric regroupe son armée et son peuple dont il a besoin pour cette nouvelle conquête, environ 20 000 guerriers et 60 000 personnes (selon les sources de Victor de Vita). Cette armée traverse le détroit de Gibraltar au printemps 429 et entame sa conquête. Après un rapide passage dans l’actuel Maroc, ils pénètrent  dans l’Algérie d’aujourd’hui pour atteindre Hippone (Bône) en juin 430. La ville tombe après un long siège, en 431, durant lequel le célèbre évêque, saint Augustin, meurt.

De 429 à 439, les Vandales prennent possession de la côte Nord-africaine et s’établissent durablement en Algérie et en Tunisie, ainsi qu’en Corse et en Sardaigne et en Sicile. Ils contraignent Rome à établir un traité (foedus) avec eux par deux fois (en 435 et 442), et constituent un royaume parfois nommé « royaume de Carthage », du nom de la capitale romaine d’Afrique qu’ils prennent en 439.

Après le traité de 442, les Vandales rendent la Sicile à Rome, en échange de la Numidie et des deux provinces de Maurétanie ; ils obtiennent en fait la province romaine d’Afrique (Tunisie et Libye occidentale).

En 533, les armées de Byzance, conduites par Bélisaire, battent les Vandales à deux reprises (bataille de Tricamarum et de l’Ad Decimum) et entre dans Carthage en octobre. En 534, reddition de Gélimer, roi des Vandales, lui et ses hommes survivants sont déportés à Byzance puis en Galatie.

Période byzantine.

empire byzantin 

On dispose de très peu d’élément sur cette période et rare sont les chercheurs qui se sont intéressé à la présence des Byzantins dans cette région du monde. Toutefois, sous Justinien 1ier, une armée de mercenaires bien entraînés, sous les ordres de deux grands généraux, Bélisaire et Narsès, reprend l’Afrique au profit de Byzance, en une campagne éclair (533-534).

Après avoir détruit ce qui subsistait de la domination Vandales, Byzance voudra redonner aux Maurétains leurs limites anciennes, et la domination byzantine fut plus étendue et peut-être même plus profonde qu’on ne le croyait, s’il faut en juger par la grande masse de vestiges retrouvés au Maroc et datant de cette époque.

Justinien avait rétabli la Tingitane comme une des sept provinces d’Afrique relevant du prétoire de Carthage. Il avait conscience que les mouvements menaçants des invasions venant d’Espagne, exigeaient le contrôle du détroit de Gadès (détroit de Gibraltar). Aussi, donna–t-il pour consigne particulière à Bélisaire : « Etablissez complètement sur le passage qui est vers l’Hispanie, et qu’on appelle Septa, des soldats avec leur tribun, homme prudent et dévoué à notre Empire, de manière qu’il puisse toujours garder ces rivages et faire savoir tout ce qui s’y passe. Vous ferez en outre établir dans ce détroit des vaisseaux légers ». (Traduction d’Avezac). C’est de cette époque que semblent dater toutes les découvertes trouvées dans le Nord du Maroc. Salomon, préfet du prétoire après le départ de Bélisaire, releva les fortifications de Septa. Malgré ces précautions,  les Wisigoths d’Espagne traversèrent le détroit sous le règne de Swinthilla (621-631) et s’établirent à Tanger.

Le christianisme en Afrique du Nord. 

augustin

A une époque où les Gaulois venaient de quitter leurs huttes, quittaient leurs vêtements en peau de bête et adoptaient le mode de vie de l’envahisseur romain, pour devenir des « Gallo-romains », en Afrique du Nord les civilisations phéniciennes, romaines, byzantines, avaient laissé leurs traces depuis un bon moment déjà.

Depuis des temps très anciens, le peuple originel de l’Afrique du Nord était de souche berbère dont les branches ont ramifié pour prendre des appellations dont ont ne fait pas forcément le rapprochement : se sont les Touaregs, les Peuls, les Maures, les Chleuhs, les Kabyles, Gétules et Massyles etc…Pendant que le célèbre « Astérix » chassait le sanglier avec son ami « Obélix », l’Afrique du Nord vivait son « âge d’or ».

 

Après le paganisme, les Dieux grecs, romains, sans doute égyptiens, cèdent la place au christianisme. Au II ème siècle, un évènement curieux qui échappe à de nombreux historiens ; deux Berbères vont constituer un tandem et détenir les deux pouvoir absolus du monde dit civilisé ; le temporel sera pour le Berbère Septime Sévère, Empereur de Rome, le spirituel sera lui pour le pape Victor (Berbère et futur saint).

D’autres suivront. Un mot particulier sur un des Pères de l’Eglise ; saint Augustin, futur évêque d’Hippone, né à Tagaste, aujourd’hui Souk-Ahras (Algérie), en 354, la même année où le pape Libère fixe le jour de la naissance de Jésus de Nazareth au 25 décembre, le même jour que la fête païenne du solstice d’hiver. Sa mère n’est autre que sainte Monique. Combien de femmes et de filles de France et d’ailleurs ignorent que leur sainte patronne était une Berbère ? Quand à saint Cyprien, évêque de Carthage au moment où l’Eglise de Rome s’était effondrée ; c’est ce Berbère qui a décrété que les offices religieux soient célébrés en Latin.

Saint Cassien n’est pas le protecteur du lac varois du même nom, mais un évêque berbère, né à Tingis (Tanger). Saint Marcellin n’est pas seulement un fromage, mais le saint homme, évêque de Gap, qui a évangélisé les Hautes-Alpes et les Alpes-Maritimes, en compagnie de saint Vincent. Les chrétiens de la Côte d’Azur l’ignorent sans doute.

La liste serait trop longue ; pensez donc : 6 400 chrétiens berbères seront béatifiés, c’est-à-dire proclamés saints ; de nombreux pays d’Europe ne peuvent pas en dire autant. Il est curieux de constater que cette période d’Histoire est entièrement occultée.

La conquête arabe.

 Conquete_Islam

Au VII° siècle, les Arabes s’élancent depuis la péninsule arabique, sabre à la main, à la conquête de l’Afrique du Nord, pour répandre le Coran et pour soumettre tous les peuples qu’ils rencontrent sur leur chemin, à la foi islamique. Après les succès acquis au Moyen-Orient et en Asie mineure, ils veulent faire la conquête du Maghreb. Mais il faudra plusieurs tentatives et beaucoup de temps, près d’un siècle, pour arriver à bout des guerriers Berbères.

L’arrivée des Arabes et l’expansion de l’islam ont été des éléments capitaux pour l’Afrique. Une très belle étude, particulièrement détaillée, a été fait par un chercheur, Olivier Bain, étude dans laquelle nous allons faire référence de nombreuses fois dans ce qui suit.

« A la faveur de la crise califale (renversement des Omeyyades par les Abbassides en 750), trois royaumes berbères indépendants apparurent, correspondant à chacun des pays actuels du Maghreb : ce furent les royaumes des Rostémides de Tahert, en Algérie, des Idrissides au Maroc, et des Aghlabides en Tunisie. S’appuyant sur le particularisme berbère, les Fatimides renversèrent les Aghlabides (909), puis firent la conquête de l’Egypte et s’établirent au Caire en 972, laissant l’Afrique de Nord sous l’autorité d’une nouvelle dynastie berbère, celle des Zirides. Ceux-ci ayant rejeté toute suzeraineté (1048), les Fatimides se vengèrent en déchaînant sur l’Ifrikiyya (Tunisie) la désastreuse invasion des Arabes Banou Hilal (1051-1052). Peu après, le Maghreb subissait une nouvelle invasion (1055). Les Almoravides (nomades berbères), venus du Sahara méridional, allaient créer un empire comprenant à la fois le Maghreb occidental et toute l’Espagne musulmane ».

« Dans la seconde moitié du XII° s. les Almoravides furent renversés par d’autres Berbères, les Almohades, qui, pour l’unique fois de l’histoire, réalisèrent l’unité du Maghreb musulman (de 1159 à 1235 environ). Mais à la suite de défaites subie en Espagne (Las Navas de Tolosa en 1212), l’empire almohade se morcela et fit place à de nouvelles dynasties locales ; les Abdelwadides de Tlemcen, les Hafsides de Tunis, les Merinides de Fès. A l’arrière plan de ces luttes entre Berbères, se poursuivaient une progressive arabisation du Maghreb à la suite d’arrivées successives de vagues arabes venues de l’Est ».

«  Ce phénomène devait avoir de graves résultats en Afrique du Nord ; tandis que les Berbères nomades se laissaient absorber, les Berbères sédentaires refluèrent vers la montagne, l’agriculture fut négligée, abandonnée, les plaines rurales devinrent misérables ».

« La fin du XV° s. voit ainsi le déclin du Maghreb, alors que les musulmans sont complètement chassés d’Europe (chute de Grenade en 1492) et que les Portugais, depuis 1415, ont réussi à établir des bases à Ceuta, Tanger, Arzila… ».

reddition grenade

La reddition de Grenade

Le Maroc médiéval.

Placé sous l’autorité du gouverneur omeyyade de Kairouan, le Maroc manifesta rapidement son esprit d’indépendance par l’agitation des Kharidjites* qui réussirent à s’emparer de Tanger dès 730 et déclenchèrent la grande révolte de 742, laquelle s’étendit à toute la Berbérie. Pratiquement isolé de l’islam après la chute des Omeyyades (750), le Maroc septentrional vit s’établir à la fin du VIII° s. la dynastie des Idrissides, qui fonda Fès en 809. Mais l’évènement décisif de l’Histoire du Maroc fut la conquête du pays par les Almoravides de 1054 à 1069. L’Almoravide Youssouf ibn Tachfin, fondateur de Marrakech (1062), réalisa le premier l’unité du Nord du pays et du Sud. A la suite des conquêtes almoravides en Espagne, la civilisation andalouse rayonna en Espagne au début du XII° s., mais, en 1147, les Almoravides furent supplantés définitivement par les Almohades, auxquels la défaite de Las Navas de Tolosa, en Espagne, porta un coup fatal (1212). Au Maroc, les Almohades furent remplacés par les Mérinides (1248-1465).

Au cours du XV° s. les Portugais décidèrent de s’assurer le contrôle de la côte atlantique marocaine afin de garantir leur navigation vers la Guinée et, plus tard, vers l’Océan Indien. Ils s’emparèrent successivement de Ceuta (1415), de Ksar es-Seghir (1458), d’Arzila et de Tanger (1471). Cet assaut de l’Occident et la ruine de l’Espagne musulmane après la prise de Grenade (1492), qui fit affluer au Maroc une foule de réfugiés musulmans pleins de rancœur  contre les chrétiens, allaient contribuer à faire du Maroc un bastion farouchement hostile à toute pénétration étrangère. Si les marabouts prêchent la guerre sainte contre les chrétiens, la dynastie des Saadiens, établie définitivement en 1554, n’hésite pas à s’allier avec les Espagnols pour préserver victorieusement l’indépendance marocaine de la conquête turque.

Après avoir vaincu les Portugais à la bataille d’Alcazar Quivir (4 août 1578), la dynastie saadienne connaît son apogée sous le règne d’Ahmed IV el-Mansour (1578-1603), mais, après une longue période de décadence et de morcellement, elle est remplacée par la nouvelle dynastie des Alaouites du Tafilalet, qui s’empare de la totalité du Maroc entre 1660 et 1670, et dont les descendants règnent toujours sur le pays.

Histoire mouvementée que celle du Maroc, d’invasions en conquêtes, des califats aux émirats en passant par les sultanats, puis aux différentes dynasties, au morcellement du pays et aux superpositions des territoires des chefs de guerres, le Maroc arrivera à se constituer en royaume unifié. Il ne faut donc pas s’étonner du chevauchement des dates et des différentes dynasties qui ont coexistées avant que l’unité ne soit réalisée. C’est sous le règne de Mohammed V que le Maroc deviendra Royaume, après avoir été dirigé, pendant des siècles par des émirs et des sultans.

La secte des sortants.

“Lors de l’assassinat du calife Othman, en juin 656, un violent conflit opposa Ali, cousin et gendre de Mahomet, proclamé calife dans la plus grande confusion, à Mu’äwiya, gouverneur de Damas et parent du calife Othman assassiné. Pour Ali dont le califat était contesté par les puissants Mecquois, le meurtre du précédent calife était un véritable désastre. Il se trouvait en butte aux accusations de la puissante famille des Banü Omayya – les Omeyyades- qui réclamaient le prix du sang d’Othman. Du fait des lourds soupçons qui pesaient sur lui, Ali ne pouvait rester sans réagir. Il proposa donc à Mu’âwiya un affrontement. Celui-ci se déroula en juin et juillet 657 sur la rive droite de l’Euphrate, à Siffin. Mu’âwiya allaient être vaincu quand un de ses généraux, Amr, usa d’un stratagème : mettre des feuillets du Coran au bout des lances. Les partisans d’Ali refusèrent de continuer le combat. Un arbitrage est alors proposé par le rusé Mu’âwiya qui se termina à l’avantage des Omeyyades : ce fut l’arbitrage d’Adhruh, en janvier 659. Or l’acceptation de ce compromis par Ali fut le point de départ d’un mouvement de révolte dans les rangs de ses compagnons. En effet, certains, déçus par la faiblesse d’Ali, « sortirent » des rangs. De ce verbe arabe « kharaja » allait naître le nom de la première secte musulmane, celle des « sortants », les kharidjites.”

Texte de :   Anne-Marie Delcambe   Docteur en droit, docteur en civilisation islamique, islamologue et professeur d’arabe.

La dynastie Idrisside.

788, c’est la naissance de la première dynastie musulmane et du premier royaume marocain. Idriss 1er, descendant d’Ali, gendre du Prophète, fuira l’Arabie pour échapper au massacre de sa famille. Il va s’installer à Volubilis en fondera Fès (5 février 789) qui, après sa mort en 791, sera désignée capitale du royaume par son fils et successeur Idriss II. Ce dernier développera la ville en 803. Il mourut en 828, laissant l’administration du royaume à ses fils, puis à ses frères. La vie économique sera très prospère à Fès. En 857 et 859, la cité se prévaudra des prestigieuses mosquées Quaraouiyine et des Andalous. Au début du XI° s. les Idrissides sont Califes de Cordoue.

Les Idrissides (788-985).

789-791  Idriss 1er

791-828  Idriss II (n’assure réellement la gouvernance qu’à partir de 803, à l’âge de 11 ans)

828-836  Mohammed ben Idris

836-848  Ali ben Mohammed (Ali 1er )

848-864  Yahya ben Mohammed (Yahya 1er )

864-866  Yahya ben Yahya (Yahya II)

866-880  Ali ben Omar (Ali II)

880-904  Yahya ben el-Kassim (Yahya III)

904-922  Yahya ben Idris (Yahya IV)

905-922  El-Hajjem el-Hassan ben Mohammed, dans le Rif (Hassan 1er)

922-925  Gouvernances (Périodes de troubles et d’anarchie)

925-927  El-Hajjem el-Hassan ben Mohammed à Fès (Hassan 1er)

927-938  Gouvernances (Périodes de troubles et d’anarchie)

938-949  El-Kassim Kannoun ben Ibrahim

949-954  Ahmed ben el-Kassim

954-974  El-Hassan ben Kannoun (Hassan II)

974-985  El-Hassan ben Kannoun (Hassan II) en exil depuis 974 jusqu’à 985, date à laquelle le dernier prince Idrisside fut assassiné sur les ordres des Omeyyades du royaume de Cordoue.

Les  califes Fatimides (909-1171).

Le fondateur de cette dynastie, Obeïd al-Mahdi était un imam chiite des Ismaéliens venus de Syrie qui se prétendait descendant du Prophète par sa fille Fatima et de son gendre Ali ibn Abi Tâlib. Installé à Kairouan, il parvint à rallier de nombreux partisans chez les berbères et à étendre son autorité sur une grande partie du Maghreb, du Maroc à la Libye. A signaler que les Fatimides n’ont pas régné ni soumis directement la partie occidentale mais uniquement assis leur autorité par le biais de certains vassaux.

Les Fatimides.

 909-934 Obeïd Allah el-Mahdi fondateur de la dynastie

934-946 Al-Kaïm bi-Amir Allah

946-952  Ismaïl el-Mansour bi-Nasser Allah

952-975 Al-Muizz li-Din Allah (le conquérant de l’Egypte)

975-996 Abou Mansour Nizar el-Aziz

996-1021   Al-Hakim bi-Amir Allah

1021-1035 Ali el-Zaher

1035-1094 El –Maustanser Billah

La dynastie Almoravides.

Dynastie Berbère originaire du Sahara occidental, leur nom, en arabe, « Al Mourabitoun » signifie les « moines guerriers ». Leur sultan, Youssef  Ibn Tachfine va construire la ville de Marrakech, future capitale du royaume, vers 1070 (la ville donnera son nom au pays : le Maroc). Il bat les armées d’Alphonse VI de Castille à Zellaca, en 1086 et réalisera l’unification politique entre le Maroc et l’Espagne musulmane. A travers lui, la civilisation andalouse se répandra au Maghreb. Ali ben Youssef, son fils, lui succédera en 1106 pour y régner durant 37 ans.

Les Almoravides (1042-1147).

 1042-1043 Yahya ben Ibrahim

1043-1055 Abdallah ben Yassine

1055-1061 Abou Bakar ben Omar

1061-1106 Youssef ben Tachfine (fondateur de la dynastie)

1106-1143 Ali ben Youssef

1143-1145 Tachfine ben Ali

1145-1146 Ibrahim ben Tachfine

1146-1147 Ishak ben Ali

La dynastie Almohade.

Dynastie Berbère originaire du Haut Atlas. Leur nom en arabe « al Mouwahidoun » signifie « les unitaires », son fondateur n’est autre qu’ibn Toumert, prédicateur à Tinmel (Haut Atlas). Abdel Moumen, son disciple, prendra Marrakech pour capitale (1147) et le titre de calife. Ce dernier entreprend la construction de la Koutoubia, puis fondera l’Empire Almohade et parviendra à unifier l’Afrique du Nord. Il décédera à Rabat en 1163 avant de pouvoir réunir l’Andalousie à son Empire. Cette gloire reviendra à son successeur Yacoub el-Mansour, victorieux à Alarcos en 1195, contre les Espagnoles et les Portugais. Après la disparition de ce dernier, les défaites militaire suivront, ce qui incitera à la division de l’Empire et à l’extinction du système religieux d’ibn Toumert (mort en 1130).

Les Almohades (1145-1269).

1145-1163 Abd el-Moumine (fondateur de la dynastie)

1163-1184 Abou Yacoub Youssef

1184-1199 Abou Youssef Yacoub el-Mansour

1199-1213 Mohammed el-Nasser

1213-1223 Youssef el- Moustanser

1223-1223 Abd el-Wahid el-Makhlou

1223-1227 Abou Mohammed el-Adil

1227-1229 Yahya el-Moutassim (1er prétendant à la succession, fils de Muhammad an-Nâsir et soutenu

par les cheikhs de Marrakech)

1227-1233 Abou el-Ala Idris el-Mamoune (2e prétendant  à  la  succession,  soutenu  par  le  souverain

chrétien Ferdinand III de Castille)

1233-1242 Abou Mohammed Abd el-Wahid el- Rachid

1242-1248 Abou el-Hassan el-Saïd el- Moutadid

1248-1266 Abou Hafs Omar el-Mourtadid

1266-1269 Abou el-Ala el-Wathik Idris

La dynastie Merinide.

Dynastie Berbère (nomades Zénètes originaire du Bassin de la Haute Moulouya). Cette dynastie aura pour capitale Fès, construira plusieurs universités (medersa) dont la Medersa Abou Inane, la Medersa Mérinide de Salé. Elle profitera du manque de dynamisme de l’Empire Almohade pour s’accaparer des villes de Fès, de Rabat et de Salé ainsi que des plaines fertiles du Sais et du Gharb. En 1269, le sultan Mérinide Abou Youssef Yacoub s’empare de Marrakech pour évincer les Almohades.

Abou el-Hassan tentera de reconstituer l’Empire vers 1331, d’où la conquête de Tlemcen en Algérie et Tunis en 1347, mais ne parviendra pas à conserver Algésiras et l’Espagne. En 1348, la peste noire et les rébellions de Tlemcen et de Tunis, marqueront le déclin des Mérinides qui ne parviendront pas à refouler les Portugais et les Espagnoles qui s’installeront sur la côte avec l’appui des Wattassides. La résistance s’organisera autour des confréries et des marabouts dont sera dérivé la dynastie saadienne.

Les Merinides (1215-1465)

 1215-1217 Abd el-Hak

1217-1240 Othman ben Abd el-Hak

1240-1244 Mohammed ben Abd el-Hak

1244-1258 Abou Yahya ben Abd el-Hak

1258-1286 Abou Youssef Yacoub ben Abd el-Hak

1286-1307 Abou Yacoub Youssef el-Nasser

1307-1308 Abou Thabet Amir

1308-1310  Abou el-Rabi Sliman

1310-1331  Abou Saïd Othman

1331-1348  Abou el-Hassan ben Othman

1348-1358  Abou Inan Fares

1358  Début du “règne des vizirs

1358-1358  Abou Ziyane el-Saïd Mohammed ben Fares

1358-1359  Abou Yahya Abou Baker ben Fares

1359-1361  Abou Salim Ibrahim

1361-1361  Abou Omar Tachfine

1361-1366 Mohammed ben Yacoub

1366-1372 Abou Fares Abd el-Aziz ben Ali

1372 Reprise du “règne des vizirs”

1372-1373 Mohammed el-Saïd

1374-1384 Abou el-Abbas à Fès

1384-1386 Moussa ben Fares (il assura une sorte d’intérim pendant le règne de Abou el-Abbas)

1386-1387 el-Wathik (il assura la deuxième partie de l’intérim du règne de Abou el-Abbas)

1384-1387 Abou Zayed Abd el-Rahman (pendant le règne de Abû al-Abbas à Fès, il régna sur Marrakech)

1387-1393 Abû al-Abbas (deuxième partie du règne)

1393-1396 Abou Fares Abd el-Aziz ben Ahmed

1396-1398 Abou Amir Abdallah

1398-1421 Abou Saïd Othman ben Ahmed

1420-1465 Abou Mohammed Abd el-Hak

Dynastie Wattasside.

La période Wattasside coïncide avec le désir des Portugais de s’assurer des côtes marocaines. L’expédition de 1437 contre Tanger est un échec. Une partie du corps expéditionnaire est fait prisonnier. Un traité intervient et les Portugais obtiennent le droit de rembarquer à la condition de rendre Ceuta. Ils laissent comme otage l’Infant Ferdinand pour garantir l’exécution du pacte. Poussé par le Pape, Edouard 1er préfère sacrifier son frère plutôt que sa place de commerce. Ferdinand meurt à Fès le 5 juin 1443.

En 1458, le roi du Portugal, Alphonse V, avait préparé une armée pour le départ d’une croisade contre les Ottomans à la demande du Pape. Il préfère finalement retourner ses forces contre Ksar es-Seghir, un petit port situé entre Tanger et Ceuta, et parvient à prendre la place.

En 1459, Abou Mohammed Abd el-Hak se retourne contre son régent Yahya et sa famille. Il les fait massacrer, seuls deux frères survivent, dont Abou Abd Allah el-Cheikh Mohammed ben Yahya, celui qui en 1472 deviendra le premier sultan Wattasside.

Ferdinand IV de Castille reprend Gibraltar en 1462.

En 1465, Abou Mohammed Abd el-Hak est égorgé, à Fès, au cours d’une révolte populaire. Un sultan Idrisside est proclamé mais son autorité se limite à la région de Fès.

En 1469, les Musulmans viennent de perdre la quasi-totalité de leurs territoires d’Al-Andalus ; seuls les Nasrides conservent Grenade et ses environs jusqu’en 1492. Cette période connaît un afflux massif, vers le Maroc, d’Andalous musulmans et de juifs pourchassés par l’inquisition et la conversion forcée au christianisme.

Profitant des désordres de Fès, le roi portugais Alphonse V parvient à prendre Asilah, puis Tanger en 1471, ce qui leur permet de contrôler le détroit de Gibraltar. Mais l’année suivante, Abou Abd Allah el-Cheikh Mohammed ben Yahya (le survivant du massacre de 1459) reprend Fès et y installe le sultanat wattasside.

Les vizirs Wattassides (1421-1549)

1420-1448 Abou Zakariya Yahya. A la mort de Abou Saïd Othman ben Ahmed, son fils, Abou Mohammed Abd el-Hak lui succède comme sultan mérinide ; il est seulement âgé d’un an. Le gouverneur de Salé, Abou Zakariya Yahya de la tribu des Banû Wattas, alliés aux Mérinides, et installé dans le Rif, exerce la régence et garde le pouvoir durant vingt-huit ans.

1448-1458 Ali ben Youssef

1458-1459 Yahya ben Abi Zakariya Yahya

1459-1472 Période d’anarchie avec une complète vacuité du pouvoir à Fès. En 1459, les vizirs Wattassides ont été massacrés par le dernier sultan mérinide Abou Mohammed Abd el-Hak qui exerça le pouvoir seul jusqu’à la révolte de 1465 où il fut égorgé par la foule.

Les sultans Wattassides (1472-1549)

1472-1504 Abou Abd Allah el-Cheikh Mohammed ben Yahya (fondateur de la dynastie)

1504-1526 Abou Abd Allah el-Bourtoukali Mohammed ben Mohammed

1526-1526 Abou el-Hassan Abou Hassan Ali ben Mohammed

1526-1545 Abou el-Abbas Ahmed ben Mohammed

1545-1547 Nasser el-Din el-Kassari Mohammed ben Ahmed

1547-1549 Abou el-Abbas Ahmed ben Mohammed

La fin des Wattassides.

De 1472 à 1505, Abou Abd Allah el- Cheikh Mohammed ben Yahya ne peut empêcher l’installation des Portugais sur les côtes marocaines ; à Safi en 1481, puis à Azemmour en 1486. Les Portugais occuperont véritablement ces deux villes en 1508 et 1513. En 1508, puis en 1515, Abou Abd Allah el-Bourtoukali échouera dans ses tentatives de reprendre Asilah et Tanger en 1511 et voit les Portugais multiplier leurs comptoirs le long de la côte. Création de Santa Cruz de Aguer (Agadir), installation à Mazagan, à l’embouchure de l’Oued Tensift.

En 1511, Mohammed al-Jazuli, chef d’une puissante zaouïa du Souss soutient la désignation comme chef de guerre le Saadien Mohammed el-Kaïm. En 1524, les Saadiens se rendent maître de Marrakech avec le soutien des tribus berbères du Souss et du Draâ.

En 1528, Abou el- Abbas Ahmed doit reconnaître aux Saadiens une indépendance de fait dans les régions du Sud. Il décide de marcher sur Marrakech mais il est battu et doit se replier. Deux fils de Mohammed el-Kaïm se partage alors le pouvoir dans le sud du pays : Amed règne sur Marrakech et Mohammed ach-Cheikh est gouverneur du Souss.

En 1537, les Saadiens obtiennent le partage du Maroc en deux royaumes après leur victoire sur les Wattasides à la bataille de l’Oued el-Abid. Les Saadiens prennent Agadir aux Portugais et apparaissent comme les défenseurs de l’Islam alors que les Wattassides cherchent à négocier avec les chrétiens. Les Saadiens reprennent tour à tour tous les comptoirs portugais, hormis Tanger, Ceuta et Mazagan. En 1548, les Saadiens font prisonnier le sultan wattasside Ahmed qui est libéré contre l’abandon de Méknès. Deux plus tard, ils prennent Fès mais échouent dans leur tentative d’expansion vers l’Algérie.

Le Wattasside Abou Hassoun Alî, appuyé par les Ottomans installés à Alger, reprend Fès. Il est finalement vaincu et tué dans le Tadla par le Saadien Mohammed el-Cheikh qui récupère Fès. Les derniers Wattassides sont massacrés par les pirates alors qu’ils fuient le Maroc.

La dynastie Saadienne (1511-1660)

Dynastie chérifienne (de « Chorfa descendants du Prophète Mohamed par son petit fils Hassan) originaire de la vallée du Draa. Marrakech sera leur capitale. En 1578, viendra le tour d’Ahmed Al Mansour el-Dahabi qui sera l’auteur de nombreux exploits, dont la victoire laborieuse de la « Bataille des trois rois » à l’Oued el-Makhazine ; la conquête de Tombouctou d’où il ramena or et esclaves ; la construction du palais el-Badii ; le développement de l’industrie du sucre et des armes…

 Dates particulières :

1524 Marrakech est prise par le chérif saadien el-Kaïm, le chef d’une tribu arabe de la vallée du Draa ; les Béni Saad. Ils vont donner leur nom à une nouvelle dynastie ; les Saadiens.

1541 Le saadien Mohammed Cheikh reprend Agadir aux Portugais.

1554 La presque totalité du Maroc est aux mains des Saadiens.

1578 Échec d’une  tentative  d’invasion  des  troupes  portugaises  débarquées  à  Asilah. Le  roi du Portugal, Don Sébastien, ainsi que deux sultans sont tués lors de la bataille dite « des trois   rois ». La menace militaire européenne est écartée pour près de trois siècles. Dans le Sud, les     Saadiens prennent le contrôle de Tombouctou et de la boucle du Niger.

1602  Mort d’Ahmed el-Mansour. L’empire saadien se fractionne et sombre dans l’anarchie.

Les sultans Saadiens. 

1511-1517 Mohammed el-Kaïm

1517-1540 Ahmed al-Arej et Mohammed el-Cheikh

1540-1557 Mohammed el-Cheikh

1557-1574 Abdallah el-Ghalib

1574-1576 Mohammed II

1576-1578 Abou Merouane Abd el-Malik

1578-1603 Ahmed el-Mansour el-Dahabi

1603-1628 Zidane el-Nasser

1628-1631 Abou Marwan Abd al-Malik II

1631-1636 El-Oualid

1636-1654 Mohammed III

1654-1660 Ahmed al-Abbas

La bataille des Trois Rois.

 bataille trois roisLa bataille des Trois Rois eut lieu le lundi 4 août 1578 dans l’Oued Makhazen à Ksar el-Kébir, au Nord du Maroc, entre les armées musulmanes du sultan Marocain Abou Marwan Abd el-Malik et de Moulay Mohammed, comprenant en plus des cavaliers marocains, des artilleurs turcs et des arquebusiers andalous, et l’armée chrétienne dirigée par Sébastien 1er, roi du Portugal. L’armée portugaise comprenait également des Espagnols, des Italiens et des Allemands.

Sébastien 1er avait rassemblé une armée de 17 000 hommes, dont 1500 cavaliers, dans le petit port de Lagos, dans le but de conquérir le Maroc. Il peut compter sur l’alliance d’un prince marocain de la dynastie des Saadiens, Mohammed el-Mottouakil qui, chassé du pouvoir par son oncle Abd el-Malik, espère le regagner grâce au soutien des Portugais. De plus, les Portugais sont installés depuis longtemps dans plusieurs places fortes de la côte, à Tanger, Ceuta, Mazagan. Partie de Lisbonne le 24 juin, l’armée de Sébastien débarque à Asilah et s’enfonce dans les terres à la rencontre D’Abd el-Malik.

La bataille eut lieu le 4 août 1578, au voisinage de l’Oued Makhzen. Après avoir cru un moment en la victoire, les Portugais et leurs alliés sont mis en déroute par 40 000 Marocains. 8 000 Portugais sont tués, 10 000 sont fait prisonniers, à peine une centaine d’entres eux peuvent gagner Tanger et transporter la nouvelle à Lisbonne.

Chose tenue inouïe et mémorable par tous les chroniqueurs de l’époque, les trois rois engagés dans ce combat, y trouvent la mort. Don Sébastien et el-Mottouakil sont noyés, et Abd el-Malik meurt de maladie. Son frère Ahmed al-Mansour Saadi est proclamé sultan sur le champ de bataille et prend le nom d’al-Mansour (le victorieux). Il fonde la dynastie saadienne et fait régner l’ordre avec une armée de mercenaires (renégats, Turcs…).

Cette victoire de l’Oued el-Makhazin accroît le prestige du Maroc et enrichit son souverain qui s’est emparé d’un important butin. Il perçoit également de nombreuses rançons en échange de la liberté des prisonniers de guerre portugais. Al-Mansour tire aussi de très grands profits des revenus de la course en favorisant les corsaires de Salé et de Rabat.

Cet évènement ne rejoindra l’Histoire officielle du Maroc que… 400 ans plus tard, pour une commémoration faite en grande pompe, avec quelques nuances historiques, pour devenir le symbole de l’opposition à la chrétienté et à l’invasion européenne. Personne ne parlait plus du « traître »qui s’était allié aux chrétiens Portugais. Les Juifs du Maroc, célébraient ce fait d’armes depuis toujours, en hommage à un sultan qui les avait protégés de l’Inquisition.

 Les Morisques, corsaires de Salé.

D’où viennent-ils ? Qui sont-ils ?

Les Morisques (de l’espagnol Morisco, littéralement « petit maure » étaient des musulmans d’Espagne convertis de force au catholicisme à la suite des édits de conversion de 1502. Ils constituaient une minorité importante dans le royaume de Valence, la vallée de l’Ebre et l’Andalousie orientale.

A partir de 1609, quand le roi Philippe III d’Espagne décida d’expulser les Morisques, au nombre de trois cent mille environ, ces « rebelles » toujours prêts à se soulever, refusèrent de se convertir et constituèrent un Etat dans l’Etat. Le danger turc devenant pressant, les Espagnoles, qui voyaient en eux une « cinquième colonne », décidèrent de les expulser, essentiellement vers le Maroc.

Certains de ces émigrés développèrent des activités de course* qui dressèrent les gouvernements européens contre le Maroc et contribuèrent à isoler le pays. C’est ainsi qu’à partir de 1609, des Morisques se fixèrent dans la kasbah des Oudaia à Rabat qui fermait l’estuaire du Bou Regreg. L’année suivante, des Morisques Andalous fondèrent Salé la Neuve où ils constituèrent une sorte de « république corsaire » en partie indépendante du pouvoir royal marocain. Forte de plusieurs dizaines de navires, la flotte corsaire maraudait sur les grandes voies maritimes de l’époque, qui toutes passaient au large du Maroc, ce qui provoqua de violentes réactions européennes, qui se traduisirent par des bombardements de villes marocaines ou par des campagnes de blocus. C’est de cette époque aussi que date la construction de la Médina de Rabat par les Morisques. La particularité de cette médina est que le plan rectiligne est très diffèrent des médinas marocaines qui ressemblent à de véritables labyrinthes.

Bou Regreg, repaire de corsaires.

C’est dans l’estuaire du Bou Regreg que naissent Rabat et Salé, il y a plus de vingt siècles maintenant. Ce fleuve prend sa source dans le Moyen Atlas et à travers les siècles, il a même changé de nom plusieurs fois. C’est ainsi que dans l’Antiquité il s’appelait Oued Sala (rivière salée), ce n’est qu’au XIII°s., qu’il devient définitivement Bou Regreg, nom sans doute tiré du berbère, « regrag » signifiant gravier en berbère. En s’engageant pour le compte du sultan, les pirates deviennent des corsaires, au service du pays. Le port de Rabat aurait alors compter jusqu’à 60 vaisseaux.

Yuder Pacha.

Yuder Pacha est un conquérant et aventurier Morisque, né vers 1550 dans la province d’Alméria. Eunuque Espagnol converti à l’islam, il fut un général du sultan Ahmed el- Mansour.

Yuder Pacha part en octobre 1590 de Marrakech, avec une armée de 4000 grenadins, 500 européens et 60 chrétiens arrachés aux geôles marocaines ainsi que 1500 lanciers marocains et des auxiliaires locaux. Traversant le Sahara par les mines de Teghaza, il rejoint Karabara, situé à l’est de Tombouctou. Il affronte, dans les environs de Tondibi, le Askia Ishaq II de Gao et ses 40 000 hommes, qu’il écrase le 13 mars 1591. Il y installe 2000 hommes sur place, qui firent souche dans la boucle du Niger et pour maintenir un empire appelé l’empire Arma, jusqu’en 1737 (défaite de Toya).

Les Morisques refusaient l’autorité de Marrakech et éliminèrent les gouverneurs venus pour gérer cette nouvelle province. L’ultime tentative de reprise en main fut brisée par la mort, en 1612, du mercenaire espagnol Mahmud el-Largo, destitué par Ali el-Telemsani. De facto, ils venaient de créer un état hispano-africain. Son système politique lui survit pendant trois siècles, jusqu’à l’arrivée des Français en 1890.

La vallée du Souss et la canne à sucre. 

canne a sucre

A la fin du XVI° s., durant la période saadienne, la culture de la canne à sucre est introduite dans la vallée du Souss.

Ce sucre servira au sultan el-Mansour qui l’échangera contre le marbre de Carrare, pour construire ses palais à Marrakech. Ce sucre est très recherché en Europe et la reine Elisabeth 1re d’Angleterre n’en veut point d’autre sur sa table.

Mais au XVIII° s., fermeture du port d’Agadir au profit du port d’Essaouira, à cause de la diminution des exportations de la canne à sucre. Ce déclin a pour cause, la concurrence de la production des Antilles et du Brésil.

En quelques décennies, le Souss remplacera la canne à sucre par une culture maraîchère.

 La dynastie Alaouite.

Originaire d’Arabie, de la région de Yanbo, dans le Hedjaz, les Alaouites descendent, comme les Saadiens, de Hassan, fils aîné de Fatima et d’Ali, fille et gendre du Prophète. Cette lignée chérifienne est venue s’installer dans le Tafilalet à la fin du XIII° s. ils sont parfois désignés sous le nom de Hassaniens.

L’avènement de cette dynastie n’a pas été des plus simple ; entre 1630 et 1640, les Alaouites ne représentent qu’une petite principauté parmi d’autres. Il leur a fallu d’abord se débarrasser d’un rival au Tifilalet, Abou Mahalla. Une fois cette base acquise, cela a permis au fils aîné de Moulay Ali Chérif, (mort en 1659, à l’âge de 80 ans), Moulay Mohammed (Mohammed I), de se frayer un chemin vers Fès. Il sera évincé par son frère, Moulay Rachid qui le bat dans la plaine des Angad et s’empare du Tafilalet. Ce dernier meurt accidentellement d’une chute de cheval en 1672 ; son demi-frère, Moulay Ismaïl, lui succède. Régnant de 1672 à 1727, Moulay Ismaïl va mettre 25 ans à résoudre les dissensions internes. Il se heurte d’abord aux ouléma et chorfa de Fès qui ont refusé de lui faire allégeance, d’où son choix de s’installer à Méknès. Son neveu, Ibn Mouhriz, est son premier opposant, proclamé sultan à Fès, Taza et même au Souss. Cette dissidence va durer quatorze années. An Nord, Khadir Ghaylan est aussi coriace. Tous bénéficient du soutien discret des Ottomans. Pour se garantir de la fidélité de son armée, Moulay Ismaïl monte une armée d’esclaves pour ne plus dépendre des tribus. Les révoltes perdurent ; ainsi son propre fils, Mohamed el-Alem, nommé gouverneur de Taroudannt, se soulève contre lui de 1700 à 1706. Pour mettre fin à cette dissidence, Moulay Ismaïl ordonne de lui couper un bras et une jambe. Sa mort lente fut une véritable tragédie. Vers la fin de son règne, le despote et l’unificateur du pays, se confondent. Durant son règne, il reprend Larache et Tanger aux Européens et étend son autorité jusqu’au fleuve Sénégal. Il tentera de nouer une alliance avec la France contre l’Espagne ; en 1699, il demande la main de Marie-Anne de Bourbon, l’une des filles de Louis XIV, mais cette union n’aura pas lieu, Louis XIV ne voulant pas se mettre à dos l’Espagne qui avait des vues sur le Maroc. Après sa disparition, le Maroc entre dans une phase d’anarchie qui va durer une trentaine d’années ; pour exemple le règne de Moulay Abdallah, intronisé et destitué cinq fois de suite.

Après cette période d’anarchie, Mohammed ben Abdallah (Mohammed III), musulman fervent et fier de sa qualité de chérif, ne songe qu’à apporter la paix et le repos à son pays. Sitôt investi du pouvoir, il réduit les impôts, frappe une monnaie saine et reconstitue une nouvelle armée avec les débris des tribus Guich. Il fortifie les ports marocains et reprend Mazagan (El-Jadida) aux Portugais en 1769. Il conclut la paix avec les Espagnols et un accord sur les prisonniers avec Louis XV, roi de France. Il signe des traités de commerce avec le Danemark, la Suède, l’Angleterre et les Etats-Unis qui venaient de proclamer leur indépendance et que Mohammed III fut un des premiers à reconnaître. Le fait le plus marquant de son règne est, sans conteste, la fondation de Mogador (Essaouira) dont il confie la construction l’architecte français Gournot, ce dernier va s’inspirer de Saint-Malo pour tracer les plans  de la ville où bientôt viennent s’installer Berbères, Juifs, Européens, Arabes…

Moulay Yazid ben Abdallah lui succède et ne gouverne que durant deux années (1790-1792). Moulay Slimane prend la suite (1792-1822), bâtisseur de mosquées et d’universités, il aide les Algériens au moment de la bataille d’Isly (1844). Suite au soutien de l’Empire chérifien à l’Emir algérien Abd el-Kader, le Maroc va connaître des crises politiques et des interventions militaires de la France (1844) et de l’Espagne (1859-1860). Des affrontements s’en suivront jusqu’en 1873, sous le règne de Mohamed IV. Malgré les efforts du sultan Moulay Hassan I, son successeur, de moderniser le pays, de rallier les tribus du Haut Atlas et de maintenir l’indépendance du Maroc, le pays va s’endetter auprès des banques étrangères. Hassan I décède en 1894, Moulay Abdelaziz lui succède et règne jusqu’en 1907 ; Moulay Hafid prend le relais. Après l’assassinat d’Européens, les Français occupent Casablanca, alors que la France et l’Espagne sont nommés mandataires de la nouvelle banque d’Etat du Maroc, au cours de la conférence d’Algésiras en 1906.

slimani

 Monnaie créée par Moulay Slimane.

Si certains guides peu informés disent que cette pièce est juive, à cause de l’étoile à six branches, c’est une erreur. C’est bien une pièce marocaine, en bronze, de l’époque du sultan Moulay Slimane. L’étoile représente le sceau de Salomon et le rond au centre de l’étoile représente l’œil de Dieu qui voit tout. La réforme de Moulay Hassan I mettra fin à l’usage des fels slimani. (Information de M. Gilles Dubus)

La dynastie Alaouite de 1631- à l’indépendance.

 1631-1635 Moulay Ali Chérif

1635-1664 Mohammed I (se proclame roi en 1640)

1664-1672 Moulay Rachid (sultan en 1666)

1672-1727 Moulay Ismaïl

1727-1728 Ahmed (1ier règne)

1728-1728 El-Malik

1728-1729 Ahmed (2ème règne)

1729-1735 Abdallah (1ier règne)

1735-1736 Ali

1736-1736 Abdallah (2ème règne)

1736-1737 Mohammed II

1738-1740 El-Moustadhi

1740-1745 Abdallah (3ème règne)

1745-1745 Zine el-Abidine

1745-1757 Abdallah (4ème règne)

1757-1790 Mohammed III

1790-1792 El-Yazid

1792-1822 Souleïmane

1822-1859 Abd el-Rahman

1859-1873 Mohammed IV

1873-1894 Hassan I

1894-1908  Abd el-Aziz

1908-1912  Abd el-Hafid

1912-1927  Youssef

1927-1953  Mohammed V

1953-1955  Mohammed ben Arafa (imposé par la France après l’exil de Mohammed V. Il n’avait  aucune légitimité pour les Marocains)

Mohammed V (roi à partir de 1957)

Le Maroc devient Royaume, après avoir été depuis plusieurs siècles, dirigé par des Vizirs, des Emirs et des Sultans.

 

Mohammed-V

 Sa majesté Mohammed V

 La guerre du Rif.

 

carte rif

L’insurrection du Rif, ce n’est pas une nouvelle « affaire » coloniale ; c’est une véritable guerre. Elle est la conséquence de la lente progression des Espagnols depuis le début des années 1900. De ses montagnes tourmentées du Rif,  un jeune chef berbère, Abdelkrim, va défier les deux puissances européennes qui occupent son pays ; l’Espagne et la France.

Dans la canicule des djebels, les grands noms de l’armée espagnoles et Françaises, comme Primo de Rivera, Francisco Franco, Lyautey, Pétain, Juin, de Lattre de Tassigny, Giraud, Catroux…Ces derniers vont vivre avec la peur de voir l’armée battue par des paysans berbères. En 1909 et 1910, les Espagnols avaient subi plusieurs humiliantes défaites qui auront des répercutions sur les évènements politiques en Europe. Les services, espagnol et français, des Affaires Indigènes, vont financer une politique délibérée de dérèglement du jeu coutumier des relations entre tribus rifaines. C’est ainsi que la tribu des Beni Ouriaghel, dirigée par le père d’Abdelkrim, plaque tournante de cette stratégie, s’est engagée à ne pas mobiliser ses troupes et si possible, favoriser les affrontements entre tribus rivales. Mais les Espagnols se montrent incapables de débarquer assez de troupes au Maroc, pour assumer leur politique. L’empoisonnement du père d’Abdelkrim, en août 1920, achève de pousser son fils à la révolte. Un an plus tard, en juillet-août 1921, le corps expéditionnaire et son chef, le général espagnol Sylvestre ont disparu dans la retentissante bataille d’Anoual, scellant ainsi l’une des plus grandes défaites militaires subis par une armée coloniale.

abdelkrim 2

Abdelkrim, élevé à l’école espagnole, universitaire, il a passé trois années en Espagne, avant de rentrer dans l’administration espagnole. Il est nommé cadi, chef de Melilla en 1915. Son charisme et la force de sa tribu ont joué en sa faveur et son pouvoir va se nourrir de la guerre qu’il veut une guerre d’indépendance ; indépendance qu’il promet au Rif d’abord, puis au Maroc tout entier. En février 1922, Mohamed Ben Abd El-Krim Khattabi proclame la République confédérée des tribus du Rif. Désormais prisonnier de ses victoires, il se condamne à une guerre totale, un djihad contre le sultan du Maroc, allié des Français, et les troupes d’occupation. Cette attitude s’explique par le fait que l’Ataturk avait déclaré la déchéance du califat (les Alaouites avaient prêté allégeance aux Turcs). Abdelkrim se trouvait donc libre de créer un Etat, d’où la République du Rif. Lyautey l’avait prédit : « …la victoire contre les Espagnols condamne les Rifains à la guerre contre les Français… ». L’indépendance du Maroc et la déposition d’un sultan soumis aux étrangers s’imposent rapidement comme les véritables buts de cette guerre.

Le risque d’une contagion qui enflammerait tout le Maghreb devient évident ; les Français, retranchés dans les postes de montagne qui ceinturent le pays rifain, ont observé une neutralité bienveillante à l’égard d’Abdelkrim, tant que son action ne nuisait qu’aux Espagnols. Tous va changer, dès lors que le chef rifain est devenu un émir menaçant la légitimité du sultan « ami de la France ». Le chef rifain dispose d’une arme redoutable, il organise les bandes tribales autour d’un noyau de réguliers bien armés, bien armé et bien encadré. Pour réduire la résistance rifaine, des gaz de combat sont massivement utilisés par les Espagnols, dotés d’un arsenal chimique grâce à l’aide allemande en 1921. En décembre 1924, les Espagnols sont à nouveau défaits à Chechaouen et se retirent vers les côtes. La France va prendre la suite du combat contre les Rifains.

Lyautey sollicite lui aussi l’utilisation des gaz, mais le Président du Conseil français, Paul Painlevé s’y oppose. C’est donc une guerre de siège que devra subir Abdelkrim qui, malgré ses victoires (il a nettoyé le Rif des Européens) devra sortir de sa montagne pour vaincre. Lyautey mis sur la touche, c’est Pétain auréolé de sa gloire de la Grande guerre qui va diriger les opérations. Largement équipée en artillerie et en aviation, le Corps expéditionnaire français reçoit des renforts en hommes et en matériels. C’est un corps d’armée qui va reconquérir le Rif contre, à peine, 5 000 guerriers rifains.

En mai 1926, la guerre du Rif est terminée. Il est difficile d’évaluer le nombre de victimes chez les Rifains, certainement très élevé, chez les civils comme chez les combattants. Abdelkrim sera envoyé en exil à Madagascar ; il s’échappera lors d’un transfert à Port Saïd, vingt ans plus tard. Son rêve est mort : « J’ai vu mes idées s’évanouir l’une après l’autre. Comme dans beaucoup de pays d’Orient, l’arrivisme, la corruption se sont introduits dans notre cause nationale ».

Que serait le Maroc si Abdelkrim avait réussi ? Le Maroc moderne n’est pas qu’une création française, ni le résultat d’une guerre d’indépendance victorieuse ; c’est le fruit d’une synthèse improbable entre la tradition plusieurs fois séculaire et la modernité occidentale mais aussi par la volonté de plusieurs personnages qui ont marqué son Histoire.

  al hocema

 8 septembre 1925. Les troupes espagnoles débarquent dans la baie d’Al Hoceima

 

vainqueurs espagnols

 

medaille maroc

 Médaille de la Paz Maroc 1909-1927

Le Rif espagnol 

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canon rif

 …hommes, femmes, enfants, un peuple entier contre l’occupant.

 

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 La reddition d’Abdelkrim.

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Abdelkrim et son frère s’embarquent le28 août 1926 à bord de l’ « Abda » à Casablanca, à destination de La Réunion, via Marseille.

 

La République du Rif.

En 1921, la tribu berbère des Aït Ouriaghel de la région d’Alhoceima, sous la conduite du jeune Abdelkrim El Khattabi, se soulève contre les Espagnols. Le général Sylvestre dispose alors d’une puissante armée forte de 18 000 soldats espagnols pour contrer les Beni Ouriaghel. En juin, la presque totalité de cette armée trouve la mort dans la bataille d’Anoual. Face à ce désastre, le général Sylvestre se suicide.

En février 1922, Mohamed Ben Abd El-Krim Khattabi proclame la République confédérée des Tribus du Rif. Les Rifains espèrent rallier les tribus de la zone sous protectorat français contre l’occupant français.

En 1925, Abdelkrim lance une offensive vers le Sud contre les forces françaises du général Lyautey qui sont battues sans difficultés et doivent se replier sur Fès et Taza. Paris envoie alors le Maréchal Pétain en lui accordant les moyens qui avaient été refusés à Lyautey. Le « Vainqueur de Verdun », allié au général Primo de Rivera lance une vaste offensive. Des armes chimiques employées par les Espagnoles firent des milliers de morts. Ce conflit, extrêmement dur, pousse les hommes d’Abdelkrim, à demander à leur chef d’engager des négociations. Des pourparlers s’engagent à Oujda, mais devant l’intransigeance des Français et des Espagnols, Abdelkrim est contraint à la reddition.

Il est exilé à La Réunion. En 1947, il est autorisé par le gouvernement français à se rendre dans le Sud de la France. IL ramène avec lui le cercueil de sa grand-mère décédée en exil. Remontant le Canal de Suez, il est invité par le roi Farouk. Il interrompt là son voyage définitivement, à la grande fureur des Français, et décide de rester en Egypte. Au Caire, devenue la capitale des nationalistes arabes, on se presse de toute part pour lui rendre visite ; même de Chine. Il restera en Egypte jusqu’à sa mort en 1963.

Pour les révolutionnaires et les indépendantistes du monde entier, la guerre du Rif reste aujourd’hui encore, un modèle de guérilla et un symbole de la lutte contre le colonialisme.

 

general Silvestre

 Le général Sylvestre

La bataille d’Anoual.

 anoual

 Les Espagnols comptent leurs morts…avec la bénédiction de l’église

Depuis dix ans, l’Espagne se trouve en difficulté pour administrer la région nord du Maroc, placée sous son autorité depuis 1912. Les troupes espagnoles se heurtent en permanence à des poches de résistance et particulièrement dans la région montagneuse du Rif.

Au début de 1921, une tribu rifaine, les Aït Ouriaghel, de la région d’Al-Hoceïma, déclenche véritablement les hostilités. A sa tête, Mohamed ben Abdelkrim Khattabi, dit Abdelkrim, un jeune, il n’a pas trente ans. Il est le fils du cadi du clan des Aït Youssef Ouaâli. Journaliste à ses heures, il a fait des études de technologie militaire en Espagne avant d’entrer dans l’administration espagnole.

Le général Manuel Fernandez Silvestre, qui commande les troupes espagnoles dans la région, est convaincu d’avoir affaire à une bande de brigands sans importance et continue sa progression vers le cœur du Rif. Abdelkrim lui fait parvenir un message d’avertissement que le général choisit d’ignorer. Il charge néanmoins l’un de ses chefs de bataillon, Jules Villar, de poster 250 hommes à Abarran, à 5 Km à l’ouest d’Anoual.

Le 1er juin 1921, les hommes de Villar ont à peine pris position qu’ils se trouvent encerclés par un millier de combattants rifains ; les Espagnols sont massacrés. Quelques hommes arrivent néanmoins à s’échapper en abandonnant armes et munitions et particulièrement de l’artillerie que récupèrent les Rifains. Grâce à cette prise, ces derniers vont poursuivre, durant près de deux mois, leur offensive. Dans l’après-midi du 21 juillet 1921, à Anoual, 3 000 combattants rifains fondent sur les 18 000 soldats espagnols, qui, surpris, sont contraint de battre en retraite. Au bout de trois semaines de combats acharnés, les Espagnols sont taillés en pièces. Le général espagnol meurt au court de cette bataille (peut-être un suicide).

A l’issue de cette bataille, les guerriers d’Abdelkrim récupèrent un matériel de guerre important, abandonné par les Espagnols : 20 000 fusils, 400 mitrailleuses, 200 canons de calibres différents avec un stock important d’obus, des millions de cartouches, des véhicules, médicaments…et même 2 avions. L’armée espagnole venait de perdre près de 18 000 hommes, 1 100 prisonniers.

Cette défaite cinglante est une humiliation pour l’Espagne, ce qui incite le général Primo de Rivera à lancer un pronunciamiento et à instaurer une dictature militaire. L’Espagne veut retirer ses troupes du Maroc, mais la France craignant une contagion dans sa zone coloniale, refuse de laisser les insurgés impunis. Le général Lyautey, Résident, déclenche les opérations militaires. La guerre du Rif va encore durer cinq années.

ANNEXES

ANNEXE 1

La bataille de l’Oued el-Makhazen (4 août 1578).

Les forces en présence

Armée régulière marocaine.

Fantassins………………………………………………………11 700

Arquebusiers montés………………………………………..3 000

Cavaliers………………………………………………………….9 250

Contingents des tribus (réserves de cavalerie)…..22 000

Détachements d’irréguliers…………………………        4 000

Total……………………………………………………………..50 000

 

Armée portugaise.

« Terços » portugais……………………………………..8 000

« Terços » des Aventuriers…………………………….1 400

« Tercio » espagnol……………………………………….1 600

Régiment allemand………………………………………2 800

Corps des Italiens……………………………………………600

« Fronteiros » de Tanger (arquebusiers)……………200

Arquebusiers de Moulay Mohammed……………….200

Total………………………………………………………….14 800

 

Cavalerie.

Cavaliers commandés par Dom Sébastien…………..600

Cavaliers commandés par le duc d’Aveiro…………..300

« Fronteiros » de Tanger (cavaliers)…………………..400

Cavaliers commandés par Moulay Mohammed……250

Total cavalerie………………………………………………..1 550

Total des effectifs………………………………………….16 350

(Cité par P. Berthier)

el makhazen

 

 

ANNEXE 2

La Dynastie Alaouite

Dynastie Alaouite 1Dynastie Alaouite 2

 

ANNEXE 3

La Conférence d’Algésiras

carte occupation

Les visées de la France pour faire du Maroc un protectorat sont dénoncées par l’Allemagne qui revendique également des intérêts politiques et économiques en vertu d’un accord de 1880. La France et l’Allemagne se mettent finalement d’accord sur l’organisation d’une conférence internationale sur le Maroc devant se tenir à Algésiras. Elle rassemble douze pays européens et c’est le président américain Théodore Roosevelt qui est choisi comme médiateur. Un droit de regard est reconnu à l’Allemagne sur les affaires marocaines. Toutefois la France et l’Espagne obtiennent des droits particuliers sur les affaires marocaines, en raisons des intérêts liant ces pays. Cet accord prévoit la constitution d’un corps de police marocain dont le commandement sera assuré par des officiers français et espagnols et il place sous contrôle financier international la Banque du Maroc, instituant par là même un régime de protectorat.

 conference algesiras

La Conférence d’Algésiras réunit du 15 janvier au 7 avril 1906, les plénipotentiaires de treize pays.

Photo Harlingue-Viollet

 consul gibraltar algesiras

Le Consul de France à Gibraltar attend l’arrivée des autorités marocaines.

ANNEXE 4

La bataille d’Elhri.

Ce village marocain va entrer dans l’histoire le 13 novembre 1914. Les troupes de Mouha ou Hammou Zayani campaient près de ce village avec environ un millier de cavaliers. Une bataille va avoir lieu entre les Français et les tribus berbères Zayanes et Ichkinrn ; les pertes infligées aux Français feront dire plus tard aux historiens que ce fut le Dien Bien Phu marocain. Cette bataille entre dans le cadre de la première campagne du Maroc de 1907 à 1914.

L’Europe est embrasée par la guerre, les autorités coloniales se trouvent devant un problème sur le territoire marocain. Sous protectorat depuis 1912, toutes les tribus ne sont pas pour autant soumises et une partie du pays mène une lutte acharnée contre l’occupant. Le gouvernement français décide de regrouper les troupes dans les zones portuaires et sur les axes stratégiques ; Kénitra-Méknès-Fès-Oujda ; Boudnib, Casablanca-Tadla. Lyautey, Résident Général au Maroc, est inquiet : « Si nous commençons à évacuer, nous sommes fichus, si nous lâchons la moindre partie du front…ce sera la boule de neige ». Avec 20 bataillons, il va continuer sa conquête et mener une lutte terrible contre les redoutables tribus berbères Zayanes, Ichikirne, Aït Atta, les Marmouchas, les Aït Allahms, Aït Sadden…sensibilisés par la propagande de Constantinople qui prêche la guerre contre les Iroumines (chrétiens). L’aide aux rebelles par les services secrets allemands et espagnols ne tarde pas à porter ses fruits par l’approvisionnement en armes et en munitions.

Sous l’autorité de Lyautey, l’armée française continue la lutte dans le cadre de la pacification. Le colonel Charles Mangin est l’un des principaux acteurs de cette guerre coloniale. IL mène l’offensive contre les tribus rebelles du Moyen Atlas, et cherche à s’emparer des plateaux du Tadla et de Beni Mellal pour contraindre les tribus Zayanes à se réfugier dans la montagne. Avec l’avancée des troupes venant de Taza et Boudnib, l’étau se resserre et la prise de Khénifra devient imminente.

L’offensive est appuyée par l’artillerie du 1ier régiment d’artillerie de montagne, débarqué à Casablanca le 13 septembre 1913 ; l’armée française déploie toute la panoplie des nouvelles armes ; mitrailleuses, aviation, artillerie…Les bastions rebelles tombent les uns après les autres : Médiouna, le 27 septembre ; Oued Zem, le 14 novembre ; Tadla, Beni Mellal. Elkssiba tombe aussi le 8 avril 1914 devant les forces du colonel Gueydon de Dives, malgré les attaques de Mouha ou Saïd et Mouha ou Hammou Zayani. Les Marocains perdent 400 hommes le 10 juin devant Khénifra qui tombe le 13 juin.

Les troupes berbères se regroupent à 20 km au Sud de Khénifra, à Elhri. La bataille d’Elhri commence par une attaque imprudente du colonel Laverdure, contre le campement de Mouha ou Hammou Zayani. Les Français disposent de 43 officiers et de 1230 hommes venus de Khénifra, ils attaquent dès l’aube du 13 novembre 1914. Surpris et désorganisés, les marocains n’offrent qu’une faible résistance. Alors que les troupes Françaises se livrent au pillage, Mouha ou Hammou Zayani échappe à la capture en se faisant passer pour un serviteur noir, grâce à sa femme.

La contre-attaque des tribus Ichkirn (El Kbab), Aït Ihand de (Krouchen), Aït Soukhmane et Aït Hdidou, surprend à son tour les français. Les Berbères attaquent avec fougue et le bilan est lourd pour les Français ; 33 officiers morts dont le colonel Laverdure ainsi que 650 soldats tués et 176 blessés. Malgré cette victoire, les Zayanis n’ont pu repousser l’assaillant, déjà aux confins de leur territoire. Les luttes intestines et l’inégalité de l’armement auront raison des insoumis.

 

 ANNEXE 5

Quelques héros marocains.

Assou Oubasslam.

Né en 1890, il succède à son père Ali Oubassalam à la tête de sa tribu (Amghar) Ilemchan en 1919. Il se distingue dès sa jeunesse par ses qualités conformes aux coutumes berbères. A l’instar de Mouha ou Hammou Zayani, il devient chef militaire et prend le flambeau de la résistance amazigh après la défaite définitive des Zayanes, malgré leur victoire sur les troupes coloniales lors de la fameuse bataille d’Elhri, en novembre 1914.

Assou Oubasslam est célèbre dans le Sud du Maroc, parmi les tribus berbères notamment, comme un héros national. La bataille de Bougafer en mars 1933 illustre ses qualités guerrières.

Mohamed Améziane (1889-1912).

Mohamed Amézine est un résistant rifain dont l’action commence bien avant Abdelkrim el Khattabi. Il est né en 1889 dans la province de Nador, au Nord du Maroc. Il étudie de façon approfondie le Coran et exerce dans la magistrature en tant que juge du Chrââ. Il lutte principalement contre l’occupation espagnole. Il commence la résistance en détruisant la ligne de chemin de fer en construction, destinée à relier Melilla aux mines de fer d’Ouksen. Les Espagnols réagissent en livrant bataille à l’endroit appelé « Diwana » qui se solde par une débâcle espagnole ; plus de 3000 soldats sont tués ou blessés. Cette victoire accroît la popularité de Mohamed Améziane et plus d’une centaine de combats contre les Espagnols sont à mettre à son actif.

Mohamed Améziane était le premier sur le front et en première ligne face à l’ennemi. Il meurt en héros sur le champ de bataille, à Hamam. Il est enterré dans sa région natale. Sa figure fait partie intégrante de l’histoire du Maroc.

Mouha ou Hammou Zayani.

Son nom : Mohammed dit Mouha ou Hammou ben Akka ben Ahmed (parfois aussi Zayani ou Ousaïd) surnommé « Amahzoune ben Moussa », en raison de sa longue chevelure.

En 1883, à l’âge de 20 ans, Mouha ou Hammoun remplace son frère à la tête des tribus Zayanes, il s’impose rapidement comme chef de guerre et sa popularité ne cesse de grandir en dehors de Khénifra. Le Sultan Alaouite Moulay Hassan I, le nomme caïd en 1886.

Déjà figure légendaire, Mouha ou Hammoun se sent humilié par le Traité d’Algésiras (1906) ; il engage les Zayanes aux côtés des Chaouias dans la bataille de Mediouna, en 1908.

Selon le bibliographe Ahmed Al Mansouri, qui le décrit comme charismatique, militaire et politique. Il était un obstacle pour la mainmise coloniale sur le Haut et Moyen Atlas. Lyautey a échoué dans sa tentative de le convaincre à se soumettre par l’intermédiaire de personnalités influentes au sein du Makhzen comme le Premier ministre Driss El Boukili et le Pacha de Boujaad, Hadj Driss Cherkaoui. Mouha ou Hammoun refusa tout compromis et choisit de continuer la lutte armée. Contraint de quitter la Kasbah de Khénifra et d’Adekhssal, il se réfugie dans la montagne où il va mener une guerre de guerrilla contre les troupes du colonel Mangin, en particulier, jusqu’à sa mort, le 27 mars 1921.

Après la signature du protectorat, Mouha ou Hammou continu sa lutte sans répit contre l’occupant. Après la mort suspect du sultan Moulay Hassan I, il organise des interventions en dehors de la tutelle du Makhzen, car selon lui, il s’agit d’un jeu politique orchestré par le puissant chambellan Ahmed dit « Bahmad », qui cachera la mort de Moulay Hassan I et organisera la Beyââ sans le consentement des oulémas de Fès. Pour éviter toute confrontation avec ses opposants, Ahmed quitte Fès pour Marrakech et dirige le pays avec tyrannie jusqu’à sa mort en 1900. Le sultan Moulay Abdelaziz se trouve alors face à un pays en ruine, ce qui rend sa tâche de gouverner très difficile, son image se terni surtout après la ratification du traité d’Algésiras. Plusieurs foyers insurrectionnels éclatent dans le pays, suite à des réformes fiscales tels que l’impôt sur les biens agricoles le « Tartib ».

Les interventions de Mouha ou Hammou :

– En Chaouia (1908)

– Contre le colonel Mangin à Oued Zem (1913)

– Contre le commandant Auber à Tadla (1913)

– Contre Duverdier (13 novembre 1913)

La participation massive des confédérations amazighes unies autour d’un seul chef en la personne de Mouha ou Hammou se réalise pour la première fois. Mais, les interventions du leader des Zayanes n’ont jamais constitué une vraie menace à la politique coloniale de la France. Les Zayanis ont été pris en tenaille par l’avancée des troupes stationnes à Tadla et à Boujaad et les troupes du général Baumgartner. Cette opération s’inscrit dans le cadre stratégique de jonction des deux Maroc : le Nord et le Sud. Après la soumission de la plupart des tribus limitrophes du pays Zayate, Mouha ou Hammou s’isole dans la montagne sans approvisionnement en armes et en nourriture. La prise de Khénifra sera définitive après le massacre des populations par l’aviation et malgré le soutien des Allemands et des Espagnols contre la France qui cesse en 1917.

La France a donc réussi à se maintenir en isolant successivement les foyers de rébellion, à commencer par Hmad El Hiba, qui marcha sur Marrakech à la tête de 10 000 hommes et se proclama sultan le 12 août 1912, mais fut battu le 6 septembre 1912 par Mangin à Sidi Bouatmane, et se réfugia à Taroudannt. La fin de la résistance se termina par la soumission des frères Oubasslam en 1934, à Bougafer, le dernier bastion de la rébellion Amazigh.

Tous les chefs de guerre sont donc battus, car ils n’ont pas agi en tant qu’entité dans le cadre national. Luttes de pouvoir pour les uns, authentiques héros pour les autres, le système tribal a eu raison des rebellions face aux désirs de conquêtes des pays européens.

 kasbah kenifra

 ANNEXE 6

 

bou-regreb

 

L’artillerie française débarque à Bou-Regreb en 1911

 

DEBARQEMENT MAROC

Les troupes françaises débarquent à Salé

ANNEXE 7

Fort de ses victoires, Abdelkrim va étendre son autorité sur l’ensemble du Rif. Ces succès favorisent la mise en place d’un Etat : la République Confédérée des Tribus du Rif. Le choix de ce terme est judicieux puisqu’il doit attirer la sympathie des occidentaux et répondre aux traditions démocratiques berbères.

Le système politico-militaire ainsi créé est doté d’une Présidence (Mohamed ben Abdelkrim), d’une délégation générale (attribuée à son frère M’hamed), d’un Ministère de la guerre (Ahmed Boudra), d’un Ministère de l’Intérieur (caïd Lyazid), des Affaires étrangères (Azerkane), des finances (Abdeslam Al Khattabi), de la Justice et de l’Instruction (fquih Zerhouni). L’Etat est consolidé par la mobilisation populaire ; cette dernière était partielle durant les phases d’accalmie, afin que les gens puissent travailler les champs. Elle était renforcée par l’application du chraa aux conflits. La République du Rif va également se doter d’une monnaie ; le rifain.

 monnaie rifaine

 

 ANNEXE 8

Louis Hubert Gonzalve Lyautey est né le 17 novembre 1854 à Nancy. Entré à Saint-Cyr en 1873, il devient officier de cavalerie. Cultivé, attiré par les lettres, il est aussi un royaliste légitimiste.

Après avoir servi en Algérie, de 1880 à 1882, il part au Tonkin en 1884 où il rencontre Gallieni qui le fera venir en 1897 à Madagascar. De retour en France, il est appelé, en 1904, par Jonnart, gouverneur de l’Algérie, pour prendre les fonctions de commandant de la subdivision d’Aïn Séfra. Commandant de la division d’Oran, en 1906, il s’empare d’Oujda (mars 1907). Rappelé en France en 1910, il est nommé commandant de corps d’armée de Rennes. En avril 1912, il devient le premier résident général de France au Maroc. Il sut conquérir l’estime des Marocains par son sens naturel de la grandeur, par son respect des croyances et des coutumes de l’islam. Il posa en même temps les bases d’un Maroc moderne. Ministre de la guerre dans le cabinet Briand (déc. 1916 à  mars 1917), il revient au Maroc. En 1921, il est fait Maréchal de France. Lors de la guerre du Rif, contre Abdelkrim, le Président du Conseil, Painlevé, lui enlève le commandement des troupes pour le remplacer par Pétain. Lyautey donne sa démission et rentre en France (sept. 1925). Il meurt à Thorey, en Meurthe et Moselle, le 21 juillet 1934. Son corps, d’abord inhumé à Rabat, fut ramené en France en 1961 et déposé aux Invalides. Lyautey était entré à l’Académie française en 1912.

 lyautey

«  J’ai réussi au Maroc parce que je suis monarchiste et que je m’y suis trouvé en pays monarchique. Il y avait le Sultan dont je n’ai jamais cessé de respecter et de soutenir l’autorité. Je ne suis pas pour la république ; je crois qu’elle est un gouvernement mauvais en soi. Je l’ai servi activement et loyalement, parce qu’elle était le gouvernement des meilleurs, et j’ai trouvé au Maroc un pays fortement hiérarchisé ou tout n’est pas comme en France soumis aux grès des  partis, de l’élection, de la démagogie, j’y ai trouvé une culture ancienne, raffinée et le sentiment des classes nécessaires ».

 

ANNEXE 9

Lettre ouverte de Mohamed Ben Abdelkrim Al Khattabi aux puissances étrangères.

Aux nations civilisées,

Nous avons déjà adressé des communications aux ambassades de certaines puissances à Tanger, en leur exprimant nos griefs à l’égard de l’Espagne et nous ignorons si notre correspondance vous est parvenue. Aujourd’hui, nous faisons appel encore une fois à vos sentiments humanitaires et nous vous demandons d’agir pour le bien-être de l’humanité entière indépendamment de toute religion ou de toute croyance. Il est temps que l’Europe, qui a proclamé au XX ème siècle sa volonté de défendre la civilisation et d’élever l’humanité, fasse passer ces nobles principes du domaine de la théorie à celui de la pratique ; il est temps ; il est temps qu’elle se dresse pour défendre les humiliés contre les agresseurs et qu’elle défende, face aux puissants, les droits des faibles que leur sens traditionnel de la dignité ne peut mener, sans apport extérieurs, qu’à une seule fin : l’autodestruction. Le Rif est actuellement le théâtre d’une guerre, une guerre injustifiée aux yeux du seigneur, qui causera la destruction de beaucoup d’Espagnols et de Rifains.

Les Espagnols croient que l’Europe les a chargé de réformer et de civiliser le Rif. Mais les Rifains demandent : « Est-ce que la réforme consiste à détruire des maisons en utilisant des armes interdites, est-ce qu’elle consiste à s’ingérer dans la religion d’autrui ou à usurper ses droits ? Ou bien n’est-elle qu’un mot pour désigner l’annexion de la terre des autres sous couvert de protection ? L’objectif de la protection est de préserver les droits et de protéger les sujets en question ? » Et l’Europe peut constater à l’heure actuelle que nous avons besoin de quelqu’un qui nous protège contre l’agression de ce pouvoir qui s’attaque à nos libertés, notre indépendance, notre honneur et nos femmes.

Le soulèvement du Rif est le résultat de l’oppression et des abus de pouvoir par des jeunes Espagnols placés ici à des postes de commande. Ils ont autorité même sur les grands docteurs Musulmans, les fonctionnaires civils et les troupes indigènes ; c’est ainsi qu’ils ont pris possession de la terre et des gens – ce qui nous rappelle les temps de la barbarie -, mais par le simple fait de porter le nom d’Européens, ils prétendent être des gens civilisés, alors qu’en réalité, loin d’être des réformateurs ou des protecteurs, ils ne sont que des conquérants aveugles.

Le Rif a mené une existence libre et ses hommes sont sacrifiés actuellement dans la défense de leur liberté et de leur religion. Le Rif ne s’oppose pas à la civilisation moderne ; il n’est pas non plus opposé aux projets de réforme ni aux échanges commerciaux avec l’Europe. Le Rif aspire à l’établissement d’un gouvernement local : c’est un point fondamental pour la protection de ses propres droits ainsi que des droits des étrangers, conformément aux clauses des accords commerciaux qui lient les puissances européennes aux puissances d’Afrique occidentale. Mais le Rif ne veut pas que les rênes du pouvoir soient aux mains d’hommes qui reçoivent de l’or étranger en paiement de leur autorité et de leur patriotisme, qui livrent la terre et ses habitants à ceux qui leur offrent de l’argent et qui ne se soucient que de veiller à leurs seuls intérêts personnels. Ces hommes, sous le couvert de titre divers qui leur ont été conférés, ne sont à l’heure actuelle que les instruments des intérêts des Espagnols, et n’ont aucun égard pour la loi islamique et pour les coutumes nationales.

Le Rif est soucieux d’établir un système de gouvernement pour lui seul, qui dépende uniquement de sa propre volonté ; il veut établir ses propres lois et ses traités commerciaux afin d’être le protecteur de ses droits sur le plan intérieur et international. L’Europe ne peut refuser un gouvernement de ce genre, tant qu’il ne s’oppose en aucune façon aux droits des Européens ou aux réformes ou à la civilisation.

L’Europe entend qu’il existe au Rif un soi-disant « Khalife » avec un « Protectorat espagnol » et des « Protecteurs ». Elle peut donc penser que ceux-ci sont établis constitutionnellement et qu’ils gouvernent en toute justice. Il n’en est rien. Le Rif a déjà fait appel à l’aide de ceux qui en Europe ont un sens de la justice, il a adressé une communication aux représentants des puissances, et il se trouve encore en armes pour chasser les destructeurs, dans l’attente d’une réponse des nations civilisées. Si celles-ci interviennent, et règlent le problème d’une manière satisfaisante pour le Rif et protégent les droits des deux parties, le Rif aurait alors la certitude que ces réclamations en faveur de l’humanité et de la civilisation étaient bien fondées ; mais si elles se tiennent à l’écart et ne convoquent pas une conférence à laquelle les chefs du Rif seraient invités pour établir le bien-fondé de leurs déclarations et se charger d’exécuter tout accord conclu, il sera clair que l’Europe ne cherche qu’à lutter contre le monde Musulman avec n’importe quelles armes et par n’importe quel moyen.

Cependant, nous ne pouvons pas penser que la conscience de ceux qui tiennent les rênes du monde civilisé, qu’ils soient Présidents ou Princes, puissent accepter avec sérénité une telle ignominie ; nous entendons ici particulièrement les pays que les liens solides unissent au monde de l’Islam. C’est le temps lui-même qui comblera ou détruira nos espoirs et l’opinion des justes estimant le moment venu nos espoirs à leur vraie valeur.

Quel était le but de l’Europe en réunissant la Conférence d’Algésiras ? Cherchait-elle à établir la loi et l’ordre, à promouvoir le bien public et garantir la prospérité économique ? Si le motif était bon et exempt de toute convoitise ou toute visée politique ou militaire (comme nous croyons qu’il le fut sans aucun doute), il répond exactement aux vœux du Rif. Le Rif n’a aucune objection d’aucune sorte à ces conditions. Tout ce qu’il veut est de se débarrasser de l’oppression espagnole, de l’agression militaire et établir son propre gouvernement local, avec une administration qu’il contrôlera lui-même.

Est-ce que l’Europe trouve dans ce souhait quoi que ce soit de nuisible à ses intérêts ou une atteinte ou au droit de ses communautés ? Y a-t-il quelque préjugé racial ou national qui l’oblige à fermer les portes de ses cercles politiques à ceux qui souffrent sous le joug espagnol ? Si l’Europe n’est pas prête à entendre les doléances du Rif  et si elle considère que celles-ci sont loin de la vérité, laissons–la découvrir la vérité par la bouche des Espagnols même, par ceux qui ont déclaré à leur parlement qu’il était nécessaire de se retirer à cause de leur échec et des outrages commis par des soldats et d’autres éléments, qui ne leur ont pas permis d’apaiser l’indignation et la colère du Rif.

Voici les doléances que nous vous adressons ouvertement, ô, nations civilisées de l’Europe ! Que la paix soit sur vous !

 

Signé : Mohamed Abdelkrim

 

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ANNEXE 10

Le cheminement du drapeau marocain à travers les siècles.

 

Au  Maroc, le drapeau a été utilisé comme symbole pour la première fois sous le règne des Almoravides (1056-1147). Auparavant, les drapeaux étaient des étendards, ou bannières, de soie blanche, soulevés durant les grandes occasions, principalement des fêtes religieuses. En période de guerre, les bannières recevaient des inscriptions coraniques et étaient portées par des soldats sur les champs de bataille. Youssef Ben Tachfine sera le premier à donner au drapeau un caractère spécifiquement marocain. En effet, les bannières utilisées jusqu’alors, se différenciaient peu de celles utilisées dans la péninsule arabique. Youssef Ben Tachfine mettra en avant son drapeau sur les champs de bataille lors de la conquête de l’Espagne.

Les Almohades et les Saâdiens, vont conserver les mêmes étendards blancs, plus tard, les Mérinides y ajoutèrent une étoile à six branches. Quand aux Alaouites, ils vont rompre avec cette tradition en optant pour un drapeau rouge, après que le sultan Moulay Rachid (1666-1672) eut défait les tribus berbères dans l’Atlas et dans plusieurs régions.

Il faudra attendre la période du Protectorat pour officialiser et généraliser l’emblème national. Sous la pression de Lyautey, le sultan Moulay Youssef va signer un dahir relatif au drapeau marocain, le 17 novembre 1915. Le dahir stipulait quelques contrevérités en escamotant en particulier une vérité historique essentielle ; le drapeau n’était pas d’un rouge uni, sans ornements, comme le stipule le dahir. Il comportait en réalité une étoile verte, mais à six branches, comme le montre les documents et les photos de l’époque. Ceci est confirmé par les sceaux officiels et la monnaie en circulation jusqu’à l’Indépendance. Lyautey a préféré y substituer une étoile à cinq branches pour une raison que lui seul connaissait.

Une autre contrevérité s’est glissée dans le dahir et concerne le « sceau de Salomon » (ou Suleyman). Ce dernier n’a pas cinq, mais six branches. Salomon et David étaient tous les deux des prophètes sacrés, chez les israélites comme chez les musulmans. L’étoile à six ou huit branches sur les bannières marocaines ne représentait aucune gêne pour les Marocains. Mais Lyautey, avec la mentalité d’européen de l’époque, devait éprouver une gêne à la vue de l’étoile de David ; il enleva donc une pointe à l’étoile.

                             Drapeau Maroc

     Drapeau du Maroc. Dictionnaire Larousse 1938                                                                                                                        

                                                                                                                    100 francs Maroc                                

 

 

 

 

                                                                                                              100 francs (1953) Empire chérifien

 

 ANNEXE 11

L’Hymne national marocain.

Sous le Protectorat français, après la mise en place d’un drapeau, premier symbole de la Nation, Lyautey a tenté de mettre en place un hymne national. Une musique fut composé à l’époque de Moulay Youssef ; mais ce ne fut qu’un simple « Salut royal » comme l’affirme le musicologue Ahmed Aïdoune ; un air sans paroles, connu comme étant « l’hymne chérifien ».

C’est en 1956, à la veille de l’indépendance, qu’un Français, chef de musique de la Garde chérifienne, le capitaine Léo Morgan (1919-1984) composa l’hymne que nous connaissant aujourd’hui. Les paroles ne seront écrites qu’en 1969. Les circonstances sportives, la qualification de l’équipe nationale de football du Maroc pour la coupe du monde de 1970 au Mexique, font que le Palais décide d’organiser un concours de poésie pour sélectionner un texte digne d’un hymne patriotique. C’est finalement le poème « Manbita al alhrar », de M. Ali Squali Houssaïni, qui sera choisi par le roi Hassan II.

hymne national.arabe

 Partition_de_l'hymne_du_Maroc