06.06.1944 – KIEFFER ET LES AUTRES !

CE JOUR-LÀ, AVEC LES 177 HOMMES DU COMMANDO KIEFFER,

IL Y AVAIT 2.865 AUTRES SOLDATS FRANÇAIS.

Rares sont les documents qui donnent avec précision le nombre de soldats Français et leurs missions au moment du débarquement en Normandie. Pourtant, les Forces Françaises Libre ont bel et bien participé à Overlord.

 

Pour le général de Gaulle et le Comité de Libération nationale, il est évident que les Français doivent prendre part à la libération de la France. Le général René Bouscat, chef d’état-major des forces aériennes estime pouvoir réunir les effectifs de 30 groupes aériens et de 4 bataillons de parachutistes (les premières unités parachutistes appartenaient à l’armée de l’Air), mais le réarmement de toutes ces unités dépendait des Alliés. Le général Bouscat propose un plan dans ce sens, le Plan VII. Ce plan est finalement accepté et les discussions s’engagent le 29 septembre 1943. Cependant, la décision ultime de la présence française le jour du débarquement appartient au commandement allié.

Estimant que le moment était venu de mettre en œuvre, en Grande-Bretagne, les groupes d’aviation et les bataillons parachutistes nécessaire, le 15 novembre 1943, le CFLN décide de la création des Forces aériennes françaises (FAFL).

Cependant, les pourparlers avec les Alliés sont au point mort au début de l’année 1944. La situation va se débloquer après discussions avec le Combined Chiefs of Staff. Une lettre du Commissaire Le Troquer adressée au général Valin, le 31 janvier 1944, assure : « que la majeur partie des Forces Aériennes Françaises sera prévue dans le plan d’emploi concernant les opérations offensives à mener sur le continent européen pour le printemps 1944 ».

Sept groupes aériens français (227 aviateurs) vont participer à l’opération Overlord, cela représente une centaine d’avions et peut paraître dérisoire aux 11 000 avions alliés qui seront engagés le 6 juin.

LES FAFL DU GROUPE « LORRAINE »

UNITÉS DES FAFL (ayant participé à Overlord)

Groupe de chasse N°1 Alsace (Squadron 341)

Groupe de chasse N°2 Île de France (Squadron 340)

Groupe de chasse Cigognes (Squadron 329 RAF)

Groupe de bombardement Lorraine

Groupe de bombardement Tunisie (Squadron 347 RAF Bomber Command)

Groupe de bombardement Guyenne (Squadron 346 RAF Bomber Command)

2ème Régiment de chasseurs parachutistes

3ème Régiment de chasseurs parachutistes

Il est 22 H 30 le 5 juin 1944 en Angleterre, 20 H30 en Bretagne. Quatre sticks parachutistes SAS, soit 36 hommes, aux ordres des capitaines Marienne, Deplante, Botella et Deschamps, embarquent dans deux quadrimoteurs Short Stirling de la RAF. Destination la Bretagne, mission : établir des bases de sabotages, particulièrement sur les voies ferrées, afin de perturber les renforts allemands vers la Normandie. Noms de codes, opération Dingson et Samwest.

Deux heures plus tard, deux équipes sont parachutées sur le secteur Plumelec-Guéhenno, à 15 km de Saint-Marcel (Morbihan). Deux autres équipes sautent sur la forêt de Duault dans les Côtes-d’Armor.

Le stick du capitaine Marienne est repéré, un important détachement géorgien encercle rapidement le groupe. Au cours de l’accrochage, le caporal Émile Bouétard est blessé puis achevé. Il est le premier mort de l’opération Overlord. Trois SAS sont fait prisonniers. Les quatorze autres rejoignent le maquis de Saint-Marcel avec l’aide de résistants.

CAPORAL ÉMILE BOUÉTARD

 

Juin et Juillet 1944, les parachutistes SAS seront intégrés comme formateurs dans les maquis de Bretagne. Allemands et Miliciens leur font une chasse en permanence. Le 18 juin au matin, le camp des maquisards (2 000 environ) et de 200 SAS, est attaqué. Des combats qui vont durer toute la journée, soutenus une heure durant par l’aviation américaine. Les Français réussiront à quitter Sérent et Saint-Marcel dans la nuit après avoir fait sauter leur dépôt de munitions.

Le 12 juillet à l’aube, un groupe de Feldgendarmes accompagnés de miliciens s’infiltre dans le bivouac du capitaine Marienne à Kerihuel Plumelec, où 18 parachutistes, maquisards et fermiers sont fusillés.

LIGNE BLEUE = VOIE FERRÉE et POINT JAUNE = SABOTAGE

Le 9 juin, le commandant Bourgoin (dit le Manchot) saute à son tour pour rejoindre ses hommes. Largage massif et trop fréquents d’armes et de munitions : 68 avions du 9 au 17 juin. Le 13 juin en particulier, 25 avions  larguent 700 containers. Une telle activité attire évidement  l’intervention des Allemands.

LE COMMANDANT PIERRE BOURGOIN

Le 17 juin 1944, pour la première fois dans l’histoire militaire, le lieutenant de la Grandière, fait larguer 4 jeeps (un parachute à chaque roue) sur le terrain Dingson près de Saint-Marcel. Les 4 jeeps arrivent intactes.

Au cours de ces deux mois de combats de harcèlement, le 4ème bataillon SAS (2ème RCP), a perdu 23 officiers et 195 hommes sur 50 officiers et 500 hommes (77 sont morts pour la libération de la Bretagne).

UNE DES FAMEUSE JEEP DES SAS
 

LES FORCES NAVALES FRANÇAISES

Depuis août 1943, les Forces Navals Françaises Libres (FNFL) représentent 7 500 marins et bâtiments de guerre, sous le commandement du vice-amiral Muselier. La plus grande partie des bâtiments et des hommes ont rejoint de Gaulle après le débarquement des Alliés en Afrique du Nord.

À l’immense armada alliée en vue de participer à l’opération « Neptune » et d’appuyer l’assaut amphibie du jour « J », 22 bâtiments de guerre français, essentiellement des frégates sont sélectionnés. Ils vont participer aux entraînements de la Royal Navy. Par l’intermédiaire de l’amiral André Lemonnier, chef d’état-major de la Marine française, les français insistent pour que 2 croiseurs y participent également, afin d’accroître le rôle de la France Libre. La requête est acceptée.

Le 6 juin 1944, la flottille française, sous le commandement du contre-amiral Robert Jaujard, est divisée en plusieurs task forces, face à différentes plages de débarquement. Les Français participent aussi bien à l’escorte des convois maritimes qu’aux bombardements des côtes normandes et à l’appui-feu des forces terrestres.

Au total, la flotte française des FNFL compte :

2 croiseurs

4 frégates de classe River

1 destroyer de classe Hunt

4 corvettes de classe Flower

7 chasseurs de sous-marins

6 vedettes rapides MTB

 

APPUI FEU NAVAL, ESCORTE ET DÉMINAGE

             NAVIRE                                 TYPE                                                  SECTEUR

 « ACONIT »                                    corvette                                               Utah Beach

 « AUDIERNE »                    chasseur de sous-marins                 Entre Port-en-Bessin et Courseulles

  « AVENTURE »                               frégate                                              Omaha Beach

 « CALAIS »                         chasseur de sous-marins                 Entre Port-en-Bessin et Courseulles

« DÉCOUVERTE »                             frégate                                                 Juno Beach

 « DIELETTE »                     chasseur de sous-marins                 Entre Port-en-Bessin et Courseulles

 « ESCARMOUCHE »                       frégate                                                Omaha Beach

« ESTIENNE D’ORVES »                  corvette                                                 Juno Beach

« GEORGES LEYGUES »                  croiseur                                                Omaha Beach

« MONTCALM »                            croiseur                                                Omaha Beach

« LA COMBATTANTE »                 destroyer                                               Juno Beach

 « PAIMPOL »                     chasseur de sous-marins                  Entre Port-en-Bessin et Courseulles

  « RENONCULE »                          corvette                                                Utah Beach

   « ROSELYS »                               corvette                                                 Utah Beach            

  « SURPRISE »                              frégate                                                    Gold Beach

   « COURBET »                             cuirassé                                   Sabordé devant Sword Beach

  « FORBIN »                         patrouilleur auxiliaire                         Sabordé devant Arromanches

  Le Courbet et le Forbin ont été sabordés pour faire brise-lames.

 

CONTRE-AMIRAL ROBERT JAUJARD
CORVETTE « ACONIT »

FRÉGATE « SURPRISE »
 

LE COMMANDO KIEFFER

LE COMMANDO KIEFFER AVANT LE 6 JUIN
 

6 juin 1944. Ouistreham. Il est 07 H 20, les 177 Français du 1er bataillon de fusiliers-marins (4ème commando), sous les ordres du capitaine de corvette Kieffer, débarquent sur la plage de Riva-Bella, sous le feu des défenses allemandes.

Le point de ralliement est une colonie de vacances, il manque 4 fusiliers à l’appel, morts sur la plage : le second-maître Raymond Dumanoir, le matelot Raymond Flesch, le quartier-maître Joseph Letang et le matelot Jean Rousseau. Après le regroupement, direction l’objectif principal : le blockhaus de l’ancien casino qui avait été rasé l’année précédente par l’armée allemande pour dégager le champ de tir, et dont il ne subsistait que le rez-de-chaussée converti en fortin par les Allemands. Il est 08 H 00, le fortin est en vue.

L’ANCIEN CASINO À L’ÉPOQUE DE L’ATTAQUE (Rien à voir avec le film « Le jour le plus long »)

Le dispositif se met en place pour réduire la position allemande. Sur la gauche, au premier étage d’une villa, le second-maître Lardennois installe 2 PIAT et les servants, ils n’ont que 4 projectiles, en effet, trop lourd à transporter.

LANCE ROQUETTE PIAT (PROJECTOR INFANTERY ANTI TANK)

Les deux premiers projectiles font mouche et détruisent le canon de 20 mm allemand. Les deux projectiles suivant élargissent l’embrasure du blockhaus. À 800 mètres de-là, un autre canon allemand a repéré la position des PIAT et les commandos doivent évacuer en toute hâte la villa. Il est 08 H 30, les commandos sont cloués au sol.

C’est à ce moment-là qu’intervient l’épisode du char Sherman.

Auparavant, parlons un peu du film « Le jour le plus long ». Si le public se régale pendant les deux heures cinquante que dure le film, les historiens s’arrachent les cheveux, car le film a pris quelques libertés avec la réalité historique. Evidemment, les images du film ont gravé dans les mémoires des scènes hollywoodiennes.

Ils y a eu 31 lieux différents de tournage, en studio, en Corse, en Angleterre, à Sainte-mer-l’Église … Une partie du film a été tourné à Port-en-Bessin, particulièrement l’attaque du casino.

Les scènes du débarquement ont été tournées  sur les plages de Salliccia, en Corse. Les péniches de débarquement du film, sont des LCVP ( Landing Craft Vehicle & Personnel) qui datent des années 60. En réalité c’était des chalands type LCI (Landing Craft Infantery).

À GAUCHE LES VRAIS.    À DROITE, LES CHALANDS DU FILM

Pour les besoins du film, une construction hollywoodienne représentait le casino d’Ouistreham, or, les scènes ont été tournées à Port-en-Bessin. Un casino qui ne ressemblait pas à l’original.

LE CASINO DU FILM CONSTRUIT SPÉCIALEMENT POUR LES SCÈNES DE L’ATTAQUE

Les religieuses qui s’approchent des lieux de combats est une fiction, il n’y a jamais eu de religieuses à ce moment-là.

Etc, etc, etc…

Retour à l’action réelle.

Il est 08 H 30, les commandos sont cloués au sol. Devant la grande difficulté de l’attaque, le chef de section de la troop 1, Le maître- principal Hubert Faure, qui n’a plus que 10 hommes valides, pense qu’il faudrait un char pour éliminer les Allemands du blockhaus. Kieffer reprend l’idée et va chercher un char, il intervient pour renforcer l’attaque du blockhaus peu de temps après. Vers 09 H 00, le Sherman ouvre le feu et réduit à néant la résistance allemande. En fait, le casino n’avait pas été pris, mais simplement réduit au silence par les tirs du char. Au moment où l’assaut devait avoir lieu, l’ordre de repli vers la colonie de vacances et arrivé pour ensuite faire mouvement vers Pegasus Bridge. D’autres combats attendent les commandos, aux Pays-Bas.

Sur les 117 commandos qui débarquèrent le 6 juin 1944, 9 sont tués le jour même. Seuls 24 hommes termineront la campagne de Normandie sans avoir été blessé.

Oubliés pour des raisons politiques, le débarquement était, selon l’avis du général de Gaulle, un évènement Allié et pas Français, et le commando avait été placé sous commandement britannique. Les commandos survivants ne recevront la Légion d’Honneur que 60 ans plus tard.

PHILIPPE KIEFFER NOMMÉ CAPITAINE DE CORVETTE LA VEILLE DU JOUR « J »

 

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