C’est le 23 janvier 1120, lors du concile de Naplouse, qu’est né l’Ordre du Temple. Sous l’impulsion de Hugues de Payns et Godefroy de Saint-Homer, la milice des pauvres chevaliers du Christ et du Temple de Salomon prend forme. L’Ordre s’était donné pour mission principale d’assurer la sécurité des itinéraires des pèlerins affluant d’Occident depuis la reconquête de Jérusalem et de défendre les états latins d’Orient.
Les premiers chevaliers de l’Ordre étaient :
- Hugues de Payns, originaire de Payns en Champagne.
- Godefroy de Saint-Omer du comté de Flandre.
- André de Montbard, originaire de Bourgogne.
- Payen de Montdidier, originaire de la Somme.
- Godefroy Brisol, originaire du comté de Hainaut.
- Rolland, originaire du marquisat de Provence.
- Archambault de Saint-Amand.
- Amaldo.
- Gondemare.
La notoriété de la milice ne parvenait pas à s’étendre au-delà de la Terre Sainte, alors Hugues de Payns et cinq chevaliers embarquèrent pour l’Occident en 1127 afin de porter un message au pape Honorius II et à Bernard de Clairvaux.
Les objectifs étaient les suivants :
- Faire reconnaître la milice par le pape et l’Église et lui donner une règle.
- Donner une légitimité aux actions de la milice puisque la dénomination de moine-soldat était une nouveauté.
- Recruter de nouveaux chevaliers et obtenir des dons pour permettre de vivre en Terre Sainte.
Le 13 janvier, le concile de Troyes mena à la fondation de l’Ordre du Temple et le dota d’une règle propre.
Réception dans l’Ordre :
Les commanderies avaient la charge permanente du recrutement des Frères. L’entrée était directe, il n’y avait pas de période de noviciat. Nobles laïcs ou paysans libres, ils prononçaient les vœux à vie. Les principaux critères étaient les suivants :
- Être âgé de plus de 18 ans.
- Ne pas être fiancé (article 669)
- Ne pas faire partie d’un autre ordre (article 670)
- Ne pas être endetté (article 671)
- Être en parfaite santé mentale et physique (article 672)
- N’avoir soudoyé personne pour être reçu dans l’Ordre (article 673)
- Être homme libre (article 673)
- Ne pas être excommunié (article 674)
Suite à une forte demande, certains étaient engagés pour une période déterminée, comme les frères mariés qui n’avaient pas le même statut. Ces derniers avaient un manteau noir ou brun avec la croix rouge pour les distinguer des frères célibataires. Les frères servants étaient choisis parmi les plus habiles marchands et quelques frères, les plus éduqués, se consacraient aux opérations bancaires.
L’expression « Grand Maître » pour désigner le chef suprême de l’ordre n’est apparue qu’à la fin du 13ème siècle lors du procès des templiers. Or, ce grade n’existait pas dans l’Ordre. Pour désigner le chef suprême de l’Ordre, il convient de dire simplement le maître de l’Ordre et non Grand Maître. Durant ses 183 années d’existence, de 1129 à 1312, l’Ordre du Temple a été dirigé par 23 Maîtres :
- Hugues de Payns, Maître de 1118 à 1136
- Robert de Craon, Maître de 1136 à 1149
- Evrard des Barres, Maître de 1149 à 1151
- Bernard de Trémelay, Maître de 1151 à 1153
- André de Montbard, Maître de 1154 à 1156
- Bertrand de Blanquefort, Maître de 1156 à 1169
- Philippe de Milly, Maître de 1169 à 1171
- Eudes de Saint-Amand, Maître de 1171 à 1180
- Arnaud de Toroge, Maître de 1180 à 1184
- Gérard de Ridefort, Maître de 1184 à 1189
- Robert de Sablé, Maître de 1191 à 1193
- Gilbert Érail, Maître de 1193 à 1200
- Philippe de Plessis, Maître de 1201 à 1209
- Guillaume de Chartres, Maître de 1210 à 1218
- Pierre de Montaigu, Maître de 1218 à 1232
- Armand de Périgord, Maître de 1232 à 1247
- Guillaume de Sonnac, Maître de 1247 à 1250
- Thomas Béraud, Maître de 1252 à 1273
- Guillaume de Beaujeu, Maître de 1273 à 1291
- Théobald Gaudin, Maître de 1291 à 1293
- Jacques de Molay, Maître de 1293 à 1314
Le 13 octobre 1307, les Templiers vont être victimes d’un complot ourdi par le roi de France. Philippe le Bel, profitant de la présence en France de Jacques de Molay, déclenche, le même jour et à la même heure, l’arrestation des Templiers dans tout le royaume. Cette opération de police a été conduite en secret par Guillaume de Nogaret. Tous les biens des Templiers sont confisqués. Sous la torture, ils vont avouer les crimes dont on les accuse. Parmi les 140 Templiers de Paris, 54 sont brûlés vifs. Le roi de France va obtenir du pape Clément V la suppression de l’Ordre au concile de Vienne le 22 mars 1312. Elle sera officialisée le 3 avril 1312. Jacques de Molay, après des mois de captivité et de tortures, sera livré au bûcher le 18 mars 1314. Les biens templiers détenus dans toutes les provinces sont transférés, par une bulle papale de mai 1312, à un autre ordre religieux militaire, les Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem.
SCEAU DES TEMPLIERS
FRÈRE GÉRARD
Au 11ème siècle, Jérusalem était sous la domination musulmane des fatimides du Caire, les chrétiens pouvaient venir librement en pèlerinage. Il existait à ce moment-là deux hospices, ou hostelleries, dans le but était de soigner les pèlerins. L’administration des deux hospices était aux mains de frère Gérard et sœur Agnès, deux laïcs. Dans les années 1070, frère Gérard décide de créer un troisième hospice dédié dans un premier temps à Saint-Jean l’Aumônier avant d’être sous le patronage de Saint-Jean le Baptiste. En 1078-1079, Jérusalem est prise par les Turcs qui sont très hostile envers les chrétiens, ils sont du reste la cause de la première croisade. Gérard et Agnès vont réussir à passer cette période qui prendra fin avec la prise de Jérusalem par les croisés en 1099.
Frère Gérard demande alors que son hospice soit reconnu. Le pape Pascal II promulgue une bulle en ce sens le 15 février 1113 en faisant de l’ « hospital » une congrégation sous la tutelle et protection exclusive du pape.
BULLE PONTIFICALE CONSERVÉE À LA BIBLIOTHÈQUE NATIONALE DE MALTE.
Gérard est reconnu comme chef de cette congrégation et le pape précise qu’à la mort de ce dernier, les membres de l’Ordre choisiront eux-mêmes son successeur.
En 1123, Raymond du Puy va succéder à deux frères intérimaires qui ont dirigé l’Ordre après le décès de frère Gérard. Il dote l’Ordre des Hospitaliers d’une règle reposant sur celles de Saint Augustin et de Saint Benoît et organise l’Ordre en trois fonctions, les frères moines et clercs, les frères laïcs et les frères convers qui tous doivent les soins aux malades. Dans le même temps, il propose l’adoption d’une bannière rouge à croix blanche avec l’approbation du pape Innocent II, en 1130, on peut dire que l’hospital est alors devenu un Ordre.
LA BANNIÈRE FLOTTE DÈS LORS SUR TOUTES LES POSSESSIONS DE L’ORDRE. C’EST L’ANCÊTRE DE TOUT CE QUI DEVIENDRA LES PAVILLONS NATIONAUX.
Ils vont construire un hôpital à Jérusalem et à Saint-Jean d’Acre et, comme les Templiers, une force militaire. Ils vont fortifier Jérusalem, Saint-Jean d’Acre, Tortosa et Antioche. En 1142, Raymond II, comte de Tripoli, leur donne le krak des chevaliers, prise en 1099 par Raymond de Saint-Gilles à l’émir d’Homs. Ouvrage qui défend la trouée d’Homs sur la route de Jérusalem.
LE KRAK DES CHEVALIERS.
En 1187, Saladin prend définitivement Jérusalem. Les Hospitaliers s’installent à Saint-Jean d’Acre. Un siècle plus tard, le 28 mai 1291, les croisés perdent Saint-Jean d’Acre, les Templiers et les Hospitaliers sont obligés de quitter la Terre Sainte.
LA BATAILLE DE SAINT-JEAN-D’ACRE 1291 PAR DOMINIQUE PAPETY.
L’Ordre se replie à Chypre et s’installe à Limasol, dont le roi Henri II de Lusignan, également roi de Jérusalem, voit d’un mauvais œil une organisation aussi puissante s’installer dans son royaume.
CHYPRE. LIMASOL, LE FORT DE KOLOSSI.
À partir de 1307, l’ordre, dont la rivalité avec le roi de Chypre ne cesse de croître, se lance dans la conquête de Rhodes, alors sous souveraineté byzantine. En 1307, Foulques de Villaret (25ème Maître de l’Ordre) se rend, sur la demande de Clément V, à Poitiers. Le pape revient sur la problématique de la croisade, mais Foulques propose un « passage » limité pour assurer de solides points d’appui avant un « grand passage ». Rhodes est conquise en 1310 et devient le nouveau siège de l’Ordre. En 1311, ils renouent avec leurs origines en créant le premier hôpital de l’île de Rhodes.
Le 2 mai 1312, une bulle pontificale transfert les biens des Templiers aux Hospitaliers. L’Ordre se met à battre monnaie.
L’Ordre des Hospitaliers va transformer son action militaire en guerre de course. La flotte des Hospitaliers va contrôler la mer Égée. Mais au cours du 14ème siècle, les Ottomans vont conquérir peu à peu les territoires riverains. En 1396, une croisade soutenue par l’Ordre essuie un échec sanglant à Nicopolis. Après cet échec, tout espoir de reconquête des lieux saints est définitivement perdu.
L’île de Rhodes est assiégée en 1440 et en 1444 par le sultan d’Égypte, mais les deux attaques sont repoussées. Une nouvelle attaque aura lieu en 1480 par les troupes du pacha Misach, ancien prince byzantin converti à l’islam, sans succès. Le combat décisif a lieu en 1522 suite à un siège de cinq mois de la ville de Rhodes par Soliman le Magnifique. Les Hospitaliers sont vaincus. Impressionné par la résistance héroïque des chevaliers, Soliman va accorder aux survivants le libre passage. Maître Philippe de Villiers de l’Île Adam obtient de pouvoir emmener toutes les précieuses reliques de l’Ordre ; la main droite de Saint Jean-Baptiste, un fragment de la croix du Christ et l’icône de la Vierge de Philerme. Trente navires seront nécessaires aux Hospitaliers pour emporter leur trésor, archives et reliques. Ils quittent définitivement Rhodes le 1er janvier 1523.
L’icône de la Vierge de Philerme est conservée au Musée national d’art de Cetinje au Monténégro. Portée disparue, elle réapparait à la fin Du 20ème siècle.
Commence alors pour les Hospitaliers, une errance de sept années qui les conduit d’abord à Civitavecchia (août 1523) en Italie. De 1524 à 1527, le pape Clément VII les hébergent à Viterbe (janvier 1524), mais finalement, ils partent pour Nice en novembre 1527 en passant par Corneto (juin 1527) et Villefranche-sur-Mer (octobre 1527).
L’empereur Charles Quint, par un acte du 24 mars 1530, confie à l’Ordre l’archipel maltais faisant du Maître de l’Ordre le prince de Malte.
PHILIPPE DE VILLIERS DE L’ISLE ADAM PREND POSSESSION DE MALTE, PAR RENÉ THÉODORE BERTHON.
Le 18 mai 1565, une importante force turque débarque à Malte et met le siège devant les positions chrétiennes. Les chevaliers de l’Ordre renforcés par des mercenaires italiens et espagnols ainsi que par la milice maltaise, sont sous les ordres du Maître Jean de Valette. Inférieurs en nombre, les défenseurs se réfugient dans les places fortifiées. Au début du mois de juillet, le siège commence. Durant deux mois, malgré leur supériorité numérique, les Ottomans sont systématiquement repoussés, causant d’importantes pertes aux Turcs. Le 5 juillet, avec l’arrivée de secours et les attaques vers les bases ottomanes, se soldent par un véritable désastre pour les Turcs.
Le 7 septembre, les secours menés par le vice-roi de Sicile, don Garcia de Tolède, débarquent à Malte et parvient à défaire l’armée turque. Démoralisé par leurs échecs, affaiblis par la maladie et le manque de nourriture, les Turcs rembarquent le 18 septembre 1565.
LEVÉE DU SIÈGE DE MALTE PAR CHARLES-PHILIPPE LARIVIÈRE.
La victoire des chevaliers de l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem à Malte a un retentissement considérable dans toute l’Europe. Les fonds affluent pour relever les défenses de Malte. Une nouvelle ville est édifiée en vue de défendre la péninsule contre un retour des armées turques. D’abord appelée Citta Umilissima, la ville prendra le nom de La Valette, en hommage au Maître de l’Ordre vainqueur des Ottomans.
MALTE, LA NOUVELLE VILLE DE LA VALETTE.
Au début de la Révolution française de 1789, les biens français des Hospitaliers sont nationalisés. Le Grand prieuré de France est dissous en 1792. Le 19 mai 1798, Bonaparte quitte Toulon pour la campagne d’Égypte avec le gros de la flotte française. Il se présente devant La Valette et demande de faire « aiguade » (remplir les barriques d’eau). Maître Ferdinand Hompesch réunit le conseil et refuse de laisser entrer dans le port plus de quatre navires à la fois. Bonaparte fait alors débarquer ses troupes et s’empare de l’île le 10 et 11 juin 1798. Une convention est signée à bord de « L’Orient » le 12 juin par laquelle l’Ordre renonce à ses droits. Hompesch ne ratifie pas, il est expulsé le 17 juin à Trieste. Le 19 juin, la flotte française met le cap sur Alexandrie après avoir laissé une garnison de 3 000 hommes et 3 compagnies d’artilleurs. Ferdinand Hompesch après avoir renoncé à son magistère, il s’ensuit une période noire pour l’Ordre jusqu’à sa chute et son éclatement.
1798. BONAPARTE DÉBARQUE SUR L’ÎLE DE MALTE.
FERDINAND VON HOMPESCH
MIGRATION DES ORDRES
ORDRE DES CHEVALIERS DE MALTE.
Après la perte des États latin du Moyen-Orient et l’installation de l’Ordre sur l’île de Rhodes (1310), les chevaliers de l’Ordre prennent le titre de chevaliers de Rhodes. Lors de la souveraineté de l’Ordre sur Malte (1530), le titre est transformé en chevaliers de Malte.
Après avoir été chassés de Malte par Bonaparte, beaucoup retournent dans leur pays d’origine, une majorité des chevaliers se retrouvent autour de Paul 1er (Russie) mais ils ne prennent pas de nom spécifique. Les autres chevaliers retournèrent dans leurs commanderies nationales. Pour les chevaliers français, ils ne pouvaient le faire, l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem ayant été dissout par la France en 1791 et tous leurs biens confisqués en 1792.
LES ÉTATS LATINS DU MOYEN-ORIENT.
Lors de la reconstruction de l’Ordre, au travers de ce qui deviendra l’Ordre souverain militaire Hospitalier de Saint-Jean de Jérusalem, de Rhodes et de Malte, cet Ordre ne sera plus uniquement un Ordre religieux. Dès 1936, avec l’approbation des différentes constitutions de l’Ordre, l’Ordre sera officialisé lors de la création officielle de l’Ordre souverain de Malte, par l’approbation pontificale de la charte, en 1961.
L’ORDRE DE MALTE AUJOURD’HUI :
FORMATION
INTERVENTIONS
MARAUDES
Issu du plus ancien organisme caritatif au monde, l’Ordre de Malte France est une association catholique, hospitalière, créée en 1927 et reconnu d’utilité publique depuis 1928.