LES GUERRES FRANCO-CHINOISES

PRISE DE BĂC NINH LE 12 MARS 1884. LA FRANCE S’Y INTÉRESSE DEPUIS 1866 CAR, PAR LE FLEUVE ROUGE, LA FRANCE PEUT ACCÉDER DIRECTEMENT À L’INTERIEUR MÊME DE LA CHINE. GÉNÉRAL MILLOT ET SON E-M.

La France, au cours de son histoire,  a été trois fois en guerre avec la Chine. La première fois, en 1856, une expédition franco-britannique pour la seconde guerre de l’Opium (8 octobre 1856-18 octobre 1860). La seconde fois, entre 1883 et 1885, une guerre qui va opposer les deux pays à propos du Tonkin et aussi pour le contrôle du fleuve Rouge qui relie Hanoï à la province chinoise de Yunnan. La politique de la France à cette époque était la conquête de l’Indochine afin de faciliter le rêve de conquête du marché chinois. Puis, une troisième fois, en 1900, lors de la révolte des Boxers.

Après plusieurs années de conflits larvés, l’assassinat de nombreux missionnaires et européens, la France et l’Angleterre envoient un ultimatum à l’Empereur de Chine, le 8 mars 1860. Fin 1859, une flotte franco-britannique avait quitté l’Europe en direction de la Chine en vue d’un règlement militaire. La France et l’Angleterre estiment que seule une guerre peut amener l’Empire chinois à la raison. Il faut savoir que les revenus du commerce de la drogue sont considérables pour la couronne britannique, ces revenus servent notamment à entretenir les troupes en Inde. Il faut savoir également que le trafic de l’opium est interdit en Chine (officiellement). Côté français et anglais, il faut un prétexte plus « civilisé » pour justifier une intervention militaire. La France prend pour prétexte le martyr d’un missionnaire, Auguste Chappedelaine, tandis que les Anglais ne se cachent pas pour le commerce de l’opium.

Après un délai de 30 jours de réflexion accordé aux Chinois, ces derniers refusent les conditions de l’ultimatum du 8 mars 1860, et le 8 avril, c’est la déclaration de guerre.

Conditions de l’ultimatum :

  • Pouvoir pénétrer sans réaction d’hostilité dans Canton
  • Pouvoir étendre le commerce à la Chine du Nord et le long du fleuve Yangzi
  • Légaliser le commerce de l’opium
  • Traiter directement avec la cour à Pékin

Cette intervention se fera avec le soutien de la Russie et des U.S.A (plus politique que militaire).

Le 21 avril, les Anglais occupent les îles de Zhoushan, dans la baie d’Hangzhou, dans le but de protéger l’accès à Shanghaï. Après une réunion préalable, il est décidé deux points de débarquement, les Français au Sud, à Chi-Kan, et les Anglais doivent arriver au Nord du Pei Ho, à Beitang. Suite à un travail de reconnaissance par l’amiral français Protet, une attaque se fera par les forts Takou. Le 21 août, une action conjointe des alliés est lancée sur les cinq forts de Takou sur les rives du Pei Ho. C’est une victoire, la route vers Tien Tsin est ouverte. Des négociations avec la Chine ne donneront rien. Les Chinois ont utilisé ces négociations  pour gagner du temps et organiser la défense de Pékin. C’est le départ des troupes alliées vers Pékin (9 au 11septembre 1860).

De nouveaux pourparlers sont demandés par des négociateurs chinois. Les alliés acceptent la discussion, mais les conditions proposées par les Chinois sont douteuses. Sentant un piège, le général français Montauban, se met en route vers Pékin le 17 septembre. Il a le commandement des troupes alliées avec, 10 000 hommes et de l’artillerie. Le 21 septembre 1860, la troupe arrive devant le pont de Palikao qui donne accès à la voie dallée qui mène à Pékin. En face, 30 000 cavaliers tatares et un plus grand nombre encore de fantassins. Les Chinois sont commandés par un général énergique, San-ko-li-tsing, décidé à en découdre avec les « longs nez », surnom méprisant donné aux européens. Le combat s’engage. Les Français repoussent l’assaut de la cavalerie chinoise, puis marchent vers le pont, faisant refluer les fantassins chinois.

CHARLES COUSIN-MONTAUBAN, COMTE DE PALIKAO

Cette journée se solde par la perte d’une dizaine de soldats alliés, plus d’un millier du côté chinois. Cette victoire dans la « Seconde guerre de l’Opium » vaudra à son héros le titre de comte de Palikao, titre accordé par Napoléon III.

Le reste sera une promenade et le corps expéditionnaire franco-anglais entre à Pékin le 7 octobre 1860, d’où s’est enfui l’Empereur Xianfeng. Ce jour-là, sur ordre de Lord Elgin, le Palais d’été, joyau architectural chinois, est mis à sac et incendié.

LE PALAIS D’ÉTÉ APRÈS L’INCENDIE

MÉDAILLE COMMÉMORATIVE DE L’EXPÉDITION DE CHINE (1860)

Le ruban est jaune avec l’inscription en chinois du mot « Pékin »

Remarque : les caractères chinois sont inversés sur le ruban, c’est une erreur qui n’a jamais été corrigée.

L’avers de la médaille est à l’effigie de Napoléon III avec l’inscription « Napoléon III Empereur »

Au revers, les inscriptions des batailles de Ta-Kou, Chang-Kia wan, Palikao et Pékin.

Autre remarque : Cette guerre est l’une des premières guerres à être suivie et documentée par des photographes, parmi lesquels le français Antoine Fauchery

LA GUERRE FRANCO-CHINOISE DE 1884-1885

Afin d’éviter le déclassement de l’expansion coloniale en Asie, la IIIème République est en confrontation ouverte avec la Chine. Pour la constitution d’un empire colonial en Asie orientale, la France a pour rivaux l’Angleterre, établie sur les côtes même de Chine, à Hong-Kong et sa proximité avec l’Inde et ses possessions en Birmanie. Ensuite, la Russie qui depuis deux siècles touche à la Chine par la Sibérie, la Mandchourie. Exclue de l’Inde par la perfide « Albion », la présence française en Asie passe obligatoirement par la péninsule indochinoise. Elle commence par s’installer en Cochinchine dès 1862.

Le Tonkin suscite la convoitise de la France comme moyen de pénétration vers les provinces chinoises. Francis Garnier avait découvert que la fleuve Rouge, traversant le Tonkin, était connecté à la province chinoise du Yunnan (mission d’exploration 1872-1873).

A la demande du gouverneur de la Cochinchine, Garnier va régler (1873) le différent entre Dupuis, un marchand et explorateur français impliqué dans un trafic d’armes pour le compte du général Ma, au Yunnan, et les Annamites. Il en profite pour conquérir avec des effectifs réduits Hanoï et les places fortes du delta du fleuve Rouge. Il va mourir le 21 décembre 1873, devant les murs de Hanoï, face aux Annamites et leurs alliés les Pavillons Noirs. Le différent est réglé par la signature du traité de 1874 entre l’Empire d’Annam et la France.

MARIE JOSEPH FRANÇOIS GARNIER DIT FRANCIS GARNIER, LIEUTENANT DE VAISSEAU

 

LES PAVILLONS NOIRS

Son prestige ébranlé par la défaite contre la Prusse en 1870, la France voit dans l’expansion coloniale un moyen de restaurer son rang de grande puissance. La France, 2ème puissance maritime, n’a pas le domaine colonial qui convient à son rang.

Le traité de 1874, qui prévoit la liberté religieuse et commerciale n’est pas respecté par l’Annam. Une nouvelle intervention militaire s’impose. Un contingent de 600 hommes, sous les ordres d’un officier de marine, Henri Rivière, débarque à Haïphong le 1er avril 1882. Ils capturent la citadelle d’Hanoï le 26 avril 1882, mais l’étau va se resserrer autour de lui. Le 19 mai 1883, Rivière est tué lors d’une sortie. Sa mort est considérée comme l’élément déclencheur de la guerre franco-chinoise de 1883-1884. La France décide d’envoyer un corps expéditionnaire au Tonkin afin de conquérir cette province par les armes et définitivement.

Le 18 août une flotte française commandée par l’amiral Courbet bombarde les forts de Thuan An sur la rivière Hué, le 21 août les forts sont capturés. Le 25 août, le nouvel empereur d’Annam, Hiêp Hoà, consent à signer le traité de Hué qui place l’Annam sous protectorat français. La chine, bien sûr, ne reconnaît pas les accords passés entre la France et l’Annam. L’amiral Courbet parvient à prendre la ville de Sonday le 17 décembre 1883. Le 12 mars 1884, le général Millot s’illustre par la prise de Bǎc Ninh où étaient retranché entre 12 000 et 30 000 Chinois. Les Chinois sont en déroute. A la poursuite de l’ennemi, Millot prend les forts de Phu Lang Giang et de Lang-Kép. Le général Brière de l’Isle, s’empare de Hung Hoa les 12 et 13 avril 1884. Il s’élance à la poursuite de l’ennemi en retraite et prend les places fortes de Phu Lam Tao et de Dông Vǎn.

AMIRAL AMÉDÉE ANATOLE COURBET (1827-1885)

Le 11 mai 1884, à Tianjin, est signé un traité qui stipule que la Chine s’engage à retirer ses troupes du Tonkin et à respecter les traités conclus entre la France et l’Annam. Les libertés commerciales entre la France, l’Annam et les provinces chinoises du Yunnan et du Guangxi sont instituées.

Un incident allait replonger la France et la Chine dans la guerre. Le 19 juin 1884, le lieutenant-colonel Dugenne se dirige vers Phu Lang Thuong avec 900 hommes, pour occuper Lang Son, That Khé et Cao Bǎng. Ce détachement tombe dans une embuscade les 23 et 24 juin, un guet-apens tendu par 4 000 Chinois. C’est l’incident de Bac Le.

L’EMBUSCADE DE BAC LE

La France exige par un ultimatum le paiement d’une indemnité et l’application des clauses du traité de Tianjin. La Chine refuse. La guerre prend alors une tournure essentiellement maritime et sur le territoire chinois lui-même. L’amiral Courbet, à la tête de la flotte d’Extrême-Orient, reçoit l’ordre « d’exercer des représailles sur la Chine pour la contraindre à exécuter la convention de Tianjin et à nous concéder des avantages représentant l’indemnité qui lui avait été réclamée…»

Le 23 août 1884, Courbet reçoit enfin l’ordre d’attaquer et il ouvre le feu sur la flotte chinoise de Fujian. En moins d’une heure, Courbet envoie par le fond la quasi-totalité de la flotte ennemie. Il parvient également à capturer les forts le long de la rivière Min et bombarde l’arsenal de Fuzhou. Le 29 août 1884, Courbet a accompli sa mission. Courbet, pour cette prouesse hors de commun, reçoit le 10 septembre la Médaille Militaire et il est promu amiral le 18 septembre.

La Chine refuse toujours d’appliquer le traité. Courbet opère alors le blocus naval de l’île de Formose (actuelle Taïwan). Il prend Keelung, le port qui dessert Taïpei, et occupe ensuite les Pescadores, chapelet d’îles qui commande le détroit qui sépare l’île du continent. Grâce aux victoires navales de Courbet, la Chine a été gravement touché sur son propre territoire, le 9 juin, elle abandonne officiellement sa suzeraineté sur l’Annam et le Tonkin. L’Indochine française pourra naître.

Au même moment, l’amiral Courbet se meurt, atteint du choléra. Le 10 juin, exténué, il ne quittera plus son lit. Le 11 juin 1885, au large de Makung dans les îles Pescadores, il meurt sur son navire amiral, le « Bayard ».

LE NAVIRE AMIRAL « BAYARD »

FORMOSE. ENTRE LE CONTINENT ET L’ÎLE, LE CHAPELET D’ÎLES DES PESCADORES

TROISIÈME INTERVENTION FRANÇAISE EN CHINE

Après plusieurs défaites, la Chine est obligée d’accepter l’entrée des occidentaux sur son territoire et d’ouvrir le commerce au monde. Cette intrusion des étrangers sur son territoire, de culture très différente, provoque une révolte nationaliste à partir de 1897, sous l’impulsion d’une secte du nom de « Poing de la concorde et de la justice » rebaptisée par les Anglais Boxers. La haine des occidentaux provoque des meurtres et des saccages. Ces évènements vont se traduire par l’intervention de huit nations qui dans un premier temps vont prendre le port de Tsingtao par les Allemands, de Port-Arthur par les Russes, de fort Bayard par les Français et de port Edward par les Anglais.

Au printemps 1900, l’impératrice Tseu Hi (ou Ci Xi) soutient ouvertement les Boxers qui attaquent maintenant les représentations étrangères, assassinent de nombreux chrétiens et détruisent des églises, attaquent des trains, puis, le meurtre du chancelier de la délégation du Japon et du chef de la délégation allemande, provoquent le siège du quartier des Légations à Pékin. L’Allemagne, l’Autriche-Hongrie, les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne, le Japon, l’Italie et la Russie vont immédiatement intervenir.

LES HUIT NATIONS

 

On estime l’effectif des Français à 17 000 hommes, les Allemands à 19 600, les Anglais à 14 500, les Italiens à 2 000, les Américains à 1 600.

L’intervention française en Chine connaît trois phases :

  • Dès juillet, un premier bataillon d’infanterie coloniale et une batterie d’artillerie, soit 800 hommes sous le commandement du lieutenant-colonel Ytasse, sont engagés lors du siège de Tien Tsin.
  • Le 15 juillet, la troupe est à deux bataillons et une batterie, soit 1 300 hommes, sous les ordres du colonel de Pelacot. Ce dernier commande la prise de Tien Tsin.
  • Avec l’arrivée des renforts, la troupe atteint la valeur d’une brigade, sous le commandement du général Frey. Cette troupe marchera sur Pékin et participera à la prise de la Cité impériale.

SOLDAT DE L’INFANTERIE DE MARINE EN 1883