Nous connaissons tous les Rois Mages. Depuis très longtemps les noms de Gaspard, Balthazar et Melchior nous sont connus. Ces Mages, venus d’Orient, d’Europe et d’Afrique ont été guidés par une étoile vers Bethlehem où Jésus venait de naître.
Ces Mages n’étaient pas rois, mais des savants, à la fois philosophe, médecins et astronomes. La grande conjonction de Jupiter et de Saturne dans le signe des Poissons, en 6-7 avant J.C. semble être un fait vérifié. Melchior, vieillard aux cheveux blancs, à la longue barbe, il offrira de l’or à Jésus, comme à son roi. Balthazar, au visage noir, portant toute sa barbe, la myrrhe qu’il apportait rappelait que tout homme sur terre était mortel. Gaspard, jeune, sans barbe, rouge de couleur, allait offrir l’encens, hommage à la divinité. Dans l’imagerie populaire, c’est ainsi que nous nous représentons les rois Mages.
Maintenant, je vais vous dévoiler le nom du quatrième Mage, car il y en eu quatre. Il correspondait avec les trois autres Mages pour échanger leur savoir. Le nom de cet autre Mage était Artaban, il vivait en Perse. C’était un homme d’une grande richesse, très érudit et d’une grande foi. Ils avaient tous les quatre étudié les Écritures et sont arrivées à la conclusion qu’une grande étoile apparaîtra dans le ciel pour annoncer la naissance d’un roi sauveur de l’humanité. Ils avaient convenu entre eux de se retrouver à un endroit précis afin de faire le chemin ensemble jusqu’à Jérusalem.
Une nuit, alors qu’il était sur le toit de sa demeure à observer le ciel, le signe apparut. C’était une étoile d’une grande luminosité, traînant derrière elle un long ruban brillant. Les autres Mages l’avaient certainement vu également et il était convenu qu’ils attendraient Artaban durant dix jours. Depuis plusieurs jours, Artaban avait préparé son voyage, sachant, d’après ses calculs, que le signe dans le ciel allait apparaitre. Il avait acheté trois joyaux, un saphir, un rubis et une perle qu’il souhaitait offrir au roi qui allait naître. Il fit seller son meilleur cheval ; chargea ses bagages, enfourcha sa monture et s’en alla vers Babylone, à dix jours de cheval.
Peu avant cette étape, le cheval d’Artaban s’immobilisa. Un homme était couché en travers de la route, fiévreux. Artaban était tiraillé entre continuer son voyage ou venir en aide à ce mourant. Comment pouvait-il abandonner son prochain, seul, face à la mort ? Les Mages étaient des astronomes, mais aussi des médecins. Il ôta sa robe et commença ses soins. Quelques heures plus tard, le patient reprit connaissance. Artaban lui donna ce qui lui restait de pain et de vin et une potion d’herbes pour le guérir.
Maintenant il fallait accélérer l’allure. L’intervention sur le mourant l’avait mis en retard et ce n’est qu’à l’aube suivant qu’il arriva au lieu convenu avec les autres Mages. Il n’y avait personne. Finalement, ses yeux se portent sur un morceau de parchemin. Il y avait écrit dessus : « Nous avons attendu jusqu’à minuit passé et nous ne pouvons pas nous attarder d’avantage. Nous partons retrouver le Roi. ? Suis-nous à travers le désert ».
Désespéré, Artaban se tient la tête à deux mains et cherche une solution. « Comment puis-je traverser le désert ? Ma monture ne pourra jamais. Il faut que j’achète chameaux et provisions pour un tel voyage. Dieu seul sait si j’arriverai à rattraper mes amis et si j’arriverai à mon but parce que je suis resté près d’un mourant pour faire preuve de miséricorde ».
Quelques temps après, lorsqu’Artaban est enfin arrivé à Bethlehem. Les rues étaient désertes. Une rumeur disait qu’Hérode envoyait ses soldats pour récolter l’impôt, aussi les hommes avaient emmené leurs troupeaux au-delà des collines et hors de portée des soldats.
Les maisons étaient vide ou presque. L’une d’elle, la porte ouverte laissait échapper un chant, une berceuse qu’une mère chantait à son enfant. Il entra et se présenta et lui dit l’objet de son voyage. La femme lui répondit qu’il y avait déjà trois jours que les Mages s’étaient présentés à Bethlehem. Ils avaient trouvé Joseph, Marie et le petit enfant et aux pieds de ce dernier, avaient déposé leurs cadeaux. Puis, ils ont disparu aussi mystérieusement qu’ils étaient arrivés. Joseph, Marie et l’enfant, la même nuit, avaient fui comme tous les habitants de la petite ville. Le bruit coure qu’ils sont partis au loin, vers l’Égypte sans doute.
Pendant qu’Artaban écoutait, l’enfant tendit sa petite main potelée et toucha la joue d’Artaban, puis sourit. Dehors, des cris de femmes. Puis, distinctement : « Les soldats d’Hérode tuent les enfants ». Artaban se dirigea vers le pas de la porte, une bande de soldats arriva à cet instant. Le capitaine tenta d’écarter notre Mage qui ne bougea pas. Calmement, il tendit la main et présenta un gros rubis et dit : « J’entends donner au capitaine ce bijou et qu’il passe son chemin et qu’il laissera cette maison tranquille ». Le capitaine, surpris, pris le rubis et dit à ses hommes : « Allez plus loin, il n’y a pas d’enfant ici ». Puis Artaban pria : « Oh Dieu, pardonne mon péché, j’ai donné à cet homme ce qui était destiné à Dieu ». Derrière lui, la femme pleurant de joie lui dit doucement : « Tu as sauvé mon fils. Que le Seigneur te bénisse et t’accorde la paix ».
Artaban poursuit sa route et ses recherches durant de nombreuses années. Il alla jusqu’aux pyramides. Puis il alla à Alexandrie prendre conseil auprès d’un rabbin qui lui dit de chercher le Roi non pas parmi les riches, mais parmi les pauvres.
Il traversa donc des pays où la famine régnait, où les pauvres pleuraient pour un bout de pain. Il alla voir les pestiférés, les prisonniers, les opprimés et les affligés. Il chercha vainement dans les marchés aux esclaves. Pendant des années, il nourrit les affamés, vêtit les nus, guérit les malades et réconforta les captifs. Trent-trois ans s’écoulèrent depuis le début de ses recherches. Ses cheveux étaient désormais blancs comme la neige des montagnes. Il savait que la fin était proche et il décida de retourner une dernière fois à Jérusalem.
C’était le moment de la Pâque, il y avait énormément de monde. Artaban demanda à un passant où se dirigeaient tous ce monde. Il lui répondit : « Nous allons à l’exécution sur le mont Golgotha. Deux voleurs vont être crucifiés et avec eux un autre appelé Jésus de Nazareth. Un homme qui a fait beaucoup de miracles et qui prétend être le fils de Dieu ».
Lorsqu’Artaban se dirigea vers le Calvaire, il vit une troupe descendre la rue, traînant une jeune femme en sanglots. Artaban s’arrêta. La jeune femme se délivra des et se jeta aux pieds d’Artaban. « Ayez pitié de moi, sauvez-moi. Mon père est mort, on me vend comme esclave pour payer ses dettes ». Artaban trembla. Le mourant sur la route de Babylone, la maison de Bethlehem et l’enfant et maintenant cette jeune femme. Il prit la perle qui lui restait, la déposa dans la main de la jeune femme et lui dit : « Ma fille, ceci est ta rançon. C’est le dernier de mes trésors que j’espérais garder pour le Roi ».
Tandis qu’il parlait, le ciel devint sombre les tremblements d’un séisme se faisaient sentir sous ses pieds. Les maisons furent durement secouées, les soldats s’enfuirent de terreur. Pour Artaban, la quête était terminée et il avait échoué. Qu’est-ce qui pouvait avoir de l’importance maintenant ? Une lourde tuile tomba d’un toit et le frappa à la tête. Il s’écroula, le souffle court et le teint livide.
Une petite voix se fit entendre et résonnait dans sa tête comme une douce musique. « Non mon Seigneur ; car lorsque j’ai vu la faim, j’ai nourri. Lorsque j’ai vu la soif, j’ai donné à boire. Lorsque j’ai vu la maladie ou la prison, je m’y suis dirigé. Voici trente-trois ans que je te cherche, mais je n’ai jamais vu ton visage, ni pu te servir, mon Roi ».
La douce voix se fit entendre à nouveau : « En vérité, je te le dis, toute les fois que tu as fait ces choses à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que tu les as faites ».La joie illumina le visage d’Artaban, puis un long et dernier souffle s’échappa de ses lèvres. Son voyage avait pris fin, le quatrième Mage avait trouvé le Roi.