LA 1ère DIVISION D’INFANTERIE MAROCAINE DÉBARQUE DANS LA BAIE DE CAVALAIRE
Le débarquement de Provence, en 1944, a été éclipsé par le jour « J » en Normandie. Pourtant, ce débarquement a précipité la retraite allemande. Il fut mené essentiellement par des troupes françaises issues de l’Armée d’Afrique. La moitié d’entre eux sont des Nord-Africains, un tiers de pieds-noirs mobilisés depuis 1942, (taux de mobilisation élevé : classe 24 à 44), 8 % de Français échappés de métropole, et 10 % des effectifs viennent d’Afrique-noire.
L’opération est sous les ordres du général américain Patch. Il dispose de 120 000 hommes de la VII° armée américaine et des 230 000 Français de la 1ère armée du général de Lattre de Tassigny. Les troupes françaises ne sortent pas du néant, depuis 1942, elles avaient repris le combat en s’illustrant en Tunisie et en Italie.
À ce moment de la guerre, Churchill était fermement opposé à un débarquement en Provence. Il souhaitait débarquer dans les Balkans pour frapper les Allemands au cœur et arriver à Berlin avant les Russes. De Gaulle veut accélérer la libération du territoire français avec l’armée française alors engagée en Italie. Le général Eisenhower veut remonter la vallée du Rhône pour faire la jonction avec les troupes du débarquement de Normandie. C’est finalement le débarquement de Provence qui l’emporte.
14 août 1944.
La B.B.C. de Londres diffuse 12 messages à la Résistance pour les régions R1, R2, R3, R4 et R6 : « Le chasseur est affamé », « Nancy a le torticolis », « Le premier accro coûte 200 francs », « Gaby va se coucher dans l’herbe » … C’est le signal. La Résistance va immédiatement entrer en action par des sabotages de voies ferrées, de ponts, de lignes téléphoniques … et créer l’insécurité sur les arrières de l’ennemi d’après un plan établi ayant chacun un but précis.
Nuit du 14 au 15 août 1944.
Des commandos français sont débarqués sur les flancs du futur débarquement. 67 hommes du Groupe Naval d’Assaut de la marine, du capitaine Seriot, débarquent à l’Est, à Miramar, avec pour objectif de couper la route aux renforts allemands venant de l’Est. Le Groupe de Commandos d’Afrique du lieutenant-colonel Georges-Régis Bouvet, avec 750 hommes, débarque à l’Ouest de la zone de débarquement, à Rayol-Canadel-sur-Mer. Sitka Force, constituée de la Spécial Service Force du colonel Edwin Walker est chargée de détruire les batteries des îles côtières de Port-Cros et du Levant, devant Hyères.
15 août 1944.
Kodak Force, composée de trois divisions de la VII° armée américaine du général Lucian Truscott et de la 1ère Division blindée du général Touzet du Vigier. L’ensemble est réparti en trois secteurs :
- Alpha Beach à l’Ouest, la 3ème Division d’Infanterie du général John O’Daniel, et le Combat Command 1 de la 1èreB. française du général Sudre. Ils débarquent sur les plages de Cavalaire, de La Croix-Valmer, et de Pampelonne à Ramatuelle.
- Delta Beach, au centre, la 45ème Division d’Infanterie américaine du major-général William W. Eagles, débarque à Sainte-Maxime sur la plage de La Nartelle.
- Camel Beach, à l’Est, la 36ème Division d’Infanterie américaine du général John E. Dahlquist, débarque sur trois plages différentes ; Fréjus-Saint Raphaël, au Dramont et sur les plages d’Anthéor à Agay.
L’objectif du débarquement et de constituer une ligne de front de 25 km (appelée Blue Line), puis de progresser vers la vallée du Rhône et de prendre contact avec les forces débarquées en Normandie.
Le 15 août, en pleine nuit, un parachutage d’hommes et de matériels ainsi que des planeurs, a lieu entre Le Muy et La Motte. 9 000 parachutistes de la Force Rugby du général Robert T. Fréderick.
LA MOTTE REVENDIQUE ÊTRE LA PREMIÈRE COMMUNE DE PROVENCE LIBÉRÉE PAR LES ALLIÉS.
16 août 1944.
Débarquement de la Force Garbo commandée par le général américain Patch avec la VII° armée américaine et la 1ère armée française commandée par le général de Lattre de Tassigny, composée des unités suivantes :
- 1ère Division Française Libre (D.F.L.) du général Brosset.
- 3ème Division d’Infanterie Algérienne (D.I.A.) du général de Monsabert.
- 1ère Division Blindée (D.B.) du général Touzet du Vigier.
Objectif : faire une poussée vers Toulon. Dans les jours suivants, l’armée « B » (1ère Armée) est complétée par les unités suivantes :
- 9ème Division d’Infanterie Coloniale (D.I.C.) du général Magnan.
- 2 groupements de Tabors marocains du général Guillaume.
- 2ème Division d’Infanterie Marocaine (DIM) du général Dody.
- 4ème Division de Montagne (DM) du général Sevez.
- 5ème Division Blindée (D.B.) du général de Vernejoul.
L’Armée « B » est par la suite organisée en deux corps d’armée :
- 1er corps d’armée commandé par le général Martin puis le général Béthouart.
- 2ème corps d’armée commandé par le général de Larminat puis par le général de Monsabert.
Le 17 août, les Alliés procèdent à une attaque de diversion à La Ciotat pour attirer les forces allemandes à l’écart des zones de débarquements. Au Nord de La Ciotat, l’aviation américaine largue 300 parachutistes factices pour renforcer la tentative de diversion.
RUPERT, LE MANNEQUIN PARACHUTISTE.
LES GÉNÉRAUX FRANÇAIS DU DÉBARQUEMENT DE PROVENCE
Le débarquement pose moins de problème qu’en Normandie. Dès le 17 août, la 19ème armée allemande se replie. Pendant que les Américains progressent sur la Route Napoléon, les Français nettoient Toulon et Marseille. En remontant la vallée du Rhône, les Allemands sont constamment sous la menace des maquis. Du fait de la destruction des ponts sur la Drôme, les Allemands sont bloqués au Nord de Montélimar. Pressés au Sud par les Français et la 3ème D.I. U.S. ils sont menacés sur leur flanc droit par l’avance rapide des Américains. Venue de Sisteron, l’avant-garde de la 36ème D.I. US s’est rabattue vers le Rhône. Après de furieux combats, la 11ème Panzer couvre la retraite des troupes allemandes s’enfuyant par la nationale 7. La Wehrmacht échappe de peu à la nasse en abandonnant l’essentiel de son matériel. Elle laisse 2 500 morts et 3 500 véhicules incendiés. Le 3 septembre, Lyon est libérée. Le 12, l’Armée de Lattre fait sa jonction avec la 2ème D.B. de Leclerc, venue de Normandie. Plus de 100 000 soldats allemands sont fait prisonniers.
En deux semaines, la Provence aura été libérée. Digne et Sisteron sont atteintes le 19 août, Gap le 20 août, Grenoble est prise le 22 août, soit 83 jours avant la date prévue. Toulon sera libérée le 23 et Marseille le 29. Enfin Lyon, le 3 septembre.
Dans les Alpes-Maritimes, Nice sera libérée le 28 août, mais Saorge n’est reprise que le 4 avril 1945. Ce fait peut-être surprenant, mais la progression vers le Nord est une priorité et les cols alpins ne constituent pas un objectif immédiat pour les états-majors alliés. Des unités allemandes refoulées d’Italie et ceux chassées de Provence s’y réfugient, notamment dans les ouvrages et les forts de la Ligne Maginot alpine. Mais les F.F.I. contrôlaient les Alpes. Les derniers combats pour libérer la région ont lieu fin avril 1945, soit huit mois après le débarquement de Provence, alors que les derniers combats ont lieu en Allemagne.
LA PROGRESSION FULGURANTE DES TROUPES DANS LA VALLÉE DU RHÔNE.
Prise de Toulon. 19 au 26 août 1944.
Ce fut l’une des batailles les plus sanglantes dans la région, faisant près de 10 000 morts. Pour les Alliés, le port de Toulon est une priorité. 15 000 soldats français vont encercler la ville ; ce sont les unités coloniales du général de Lattre de Tassigny. Les troupes françaises peuvent compter sur la Résistance, 900 résistants vont faire face aux Allemands au centre-ville. Toulon est déjà largement touchée par des bombardements alliés.
L’ARSENAL DE TOULON EST RUINÉ.
La précision des bombardements était très relative. La population civile n’était pas visée, mais beaucoup de bombe sont tombées à côté des objectifs. Les Allemands noyaient la ville sous des fumigènes à chaque alerte. Le port est lui aussi complètement dévasté. Toulon a été libéré officiellement le 27 août 1944 et les navires français n’ont pu entrer dans le port que le 13 septembre. Il a fallu déminer le port, enlever les carcasses de navires et réparer les quais qui avaient été endommagés.
BOMBARDEMENT DE TOULON
La prise de Marseille, 21 au 28 août 1944.
Après les bombardements sur les côtes varoises, les Allemands se retranchent dans les bunkers et se terrent. Ils ont maille à partir avec la Résistance et font sauter les installations portuaires, coulent 200 navires dans le port et font sauter le fameux pont transbordeur de Marseille, le 22 août.
22 AOÛT 1944, C’EST LA FIN DU PONT TRANSBORDEUR.
Le 19 août, le général de Lattre de Tassigny avait reçu la mission du général Patch, de prendre Toulon et Marseille. Deux groupements sont constitués afin d’attaquer les deux ports simultanément. Le second groupement, aux ordres de général de Monsabert, est chargé d’attaquer Marseille. Il dispose de 12 000 hommes, essentiellement de la 3ème D.I.A., des groupements de Tabors marocains et du CC 1 de la 1ère D.B.
Les F.F.I. de Marseille préparent la libération de la ville. Le lundi 21 août, ils lancent une insurrection et une grève générale. Ils occupent rapidement les bâtiments officiels et les carrefours, mais, mal armés, leurs position est rapidement critique. L’arrivée des troupes du général de Monsabert, le 23 août, va rétablir la situation. Les Allemands se méprennent sur l’importance de l’insurrection, bluffés par les actions de la Résistance, et la rapidité de l’avance des troupes de débarquement, ce qui les mènent à des erreurs stratégiques.
Le 20 août 1944, la prise du carrefour du Camp au Nord de la Ciotat, ouvre la route d’Aubagne qui sera prise après de durs combats 21 et 22 août. La ville de La Ciotat avait réussi à se libérer elle-même le 20 août par une action vigoureuse de la Résistance. Le 22 août, la ville de Peypin est investie. Le même jour, outrepassant les ordres, le colonel Chapuis avec le 1er bataillon du 7ème R.T.A. et les chars d’un escadron du 2ème R.C., s’introduisent dans Marseille. Les 2ème et 3ème bataillons du 7ème R.T.A. sont sérieusement accrochés au Nord et au Nord-est de la ville. Les troupes passées par Simiane sont bloquées à Septèmes, jusqu’à ce que les unités passées par les cols à l’Est du massif ne prennent les Allemands à revers.
Après une tentative de règlement à l’amiable le 23 août, les combats reprennent. De Lattre engage alors le 3ème R.T.A. en provenance de Toulon. Les affrontements des jours suivants sont particulièrement meurtriers, notamment pour la prise de la colline de Notre-Dame de la Garde, les 25 et 26 août, et de la gare Saint-Charles.
COMBATS POUR LA PRISE DE LA COLLINE NOTRE-DAME DE LA GARDE.
Mais c’est au Nord, au carrefour de la Gavotte, que la défense allemande est redoutable avec l’ouvrage en béton de la « Feste ». Parois épaisses de 3 à 4 m, D.C.A., barbelés, mines, 6 pièces de Flak de 88 desservis par des souterrains. Ce n’est que le 27 août que les positions de Tanta Rose, Verduron-Haut, Moulin du Diable au-dessus de la Gavotte, et le Sud-ouest de Septèmes seront conquises.
Au Sud, malgré quelques accrochages, la progression est plus aisée pour le 2ème et 3ème G.T.M. Après un dernier combat au Fort Napoléon du cap Croisette, le 28 août, c’est l’ensemble du littoral Sud qui est sous contrôle. Le 27 août, la plus grande partie de la ville est libérée, l’ennemi ne tient plus que les installations portuaires. Le 28, ils se rendent finalement.
Au cours des combats pour la libération de Marseille, l’armée française et les F.F.I., ont eu entre 1 400 et 1 800 tués et blessés. Du côté allemand, on dénombre environ 2 000 tués et 11 000 prisonniers.
MARSEILLE LIBÉRÉE.
La mission confiée au général de Lattre de Tassigny est remplie. Complément du débarquement Alliés de Normandie, le débarquement de Provence visait à prendre les Allemands en tenaille. Les troupes françaises s’y sont particulièrement illustrées, commandés par un chef d’exception ; le général Jean de Lattre de Tassigny.
Ils ont libéré Toulon, Marseille, Lyon, Colmar … réussi leur jonction avec les Forces Françaises de l’Intérieur et les forces du débarquement de Normandie, franchi le Rhin et terminé la guerre sur le Danube. Rallié à de Gaulle après le débarquement en Afrique du Nord, en 1942, de Lattre va organiser l’armée française. Il sera le seul général français, durant cette guerre, qui a eu des unités américaines sous ses ordres.