HISTOIRE DE CASSOULET !!!

Grand débat à la télévision : plat préféré des Français, couscous ou cassoulet. C’est le cassoulet qui l’emporte nettement. Quoi de plus normal que la cuisine des terroirs prenne le pas sur les nems et le couscous.

Qu’est-ce que le cassoulet ?

C’est une estouffade de viandes et de haricots blancs. Étymologiquement, le nom de ce met est issu du récipient en terre cuite au four, la cassole, diminutif du provençal casso, qui a également donné le mot casserole en français.

La recette du cassoulet obéit à des règles précises : les haricots blancs, traditionnellement des lingots de Pamiers, de Cazères ou de Lavalanet, haricots d’origine sud-américaine. On fait macérer les haricots dans de l’eau (autrefois de l’eau de pluie) pendant une demi-journée. On ajoute tomates et carottes. Il faut aussi de la couenne de porc dont on enduit la cassole, ce qui donne du goût aux haricots. On ajoute sel, poivre et aromates. Puis on ajoute les viandes, porc, mouton ou saucisse.

Là, c’est le début d’un conflit.

À Castelnaudary, le porc domine avec la longe de porc, le jarret, le jambon, le saucisson et les couennes de lard fraîches, et du confit d’oie.

À Carcassonne, il n’y a pas de longe de porc, mais on ajoute du mouton (épaule ou gigot) et en saison de chasse, une perdrix.

À Toulouse, on met peu de porc, pas de longe, mais du lard de poitrine, de la poitrine de mouton, de la saucisse de Toulouse et du confit de canard.

La cuisson au feu dans la cassole doit être de douze heures minimum à plusieurs jours, de telle façon que les haricots deviennent fondants. Il faut perforer la croûte de cuisson recouverte de chapelure en début de cuisson au moins six fois (sept à, Castelnaudary, huit à Toulouse).

Que serait le cassoulet sans le haricot et le maïs qui sert à engraisser oies et canards, et qui sont tous originaires des Amériques, produits de base de la nourriture amérindienne. Le haricot est arrivé en France depuis l’Italie, dans les bagages de Catherine de Médicis, via l’Espagne. Le pape Clément VII en avait encouragé la culture. Il ne faut pas confondre, au XVIIème siècle on parle de fève ou féverelle dans les recettes de l’époque.

 

Prosper Montagné, né à Carcassonne en 1865, mort en 1942, auteur du premier Larousse gastronomique, va trouver la solution pour mettre fin à la guerre du cassoulet. Il nous dit :

 

«  Dieu le père est le cassoulet de Castelnaudary

Dieu le fils, celui de Carcassonne

Et le Saint-Esprit celui de Toulouse »

Il y a même eu une querelle entre l’Église et le cassoulet, un vrai combat entre le carnaval et le carême au cours de la moitié du XXème siècle. En 1972, plusieurs associations gastronomiques françaises assistent à une messe dans l’église Saint Michel à Castelnaudary, l’archiprêtre avait accepté de bénir cette manifestation. Mais quelques curées et dames patronnesses se sont élevés contre « ceux qui font carnaval pendant les offices et ont le ventre plein ». En plein XXème siècle, le combat du carnaval contre le carême dur encore.

La légende fait naître le cassoulet durant la Guerre de Cent Ans.

L’origine du cassoulet remonte au Moyen Âge, on parlait alors de ragoût, plat de viande en sauce qui mijote longuement près du feu de l’âtre. Un grand cuisinier, et de plusieurs rois durant soixante ans, va marquer le XIVème siècle : « Le Vivandier » écrit par Taillevant, de son vrai nom Guillaume Tirel. Il crée un ouvrage qui fait la part belle aux pâtés et aux ragoûts dont le ragoût de mouton et de porc aux fèves (fèves, comme on disait au XVIIème siècle).

 

Ce ragoût fut mis à cuire, à la fin du XIVème siècle, dans un plat à la forme particulière, une cassole, créée dans un village près de Castelnaudary, Issel, et qui au fil du temps va donner son nom au plat mythique. En 1377, Guillaume de Plane, seigneur d’Issel, avait fait venir un potier italien du nom de Jean Gabalda qui, dans son atelier de poterie, fabriquait des pièces ménagères, réchauds, passoires, marmites et oules. La cassole était donc connue dans le Lauragais depuis le XIVème siècle et cette terre cuite d’Issel va donner au cassoulet son goût si particulier.

Comme beaucoup de faits historiques, le cassoulet a sa légende. Elle nous raconte que durant le siège de Castelnaudary, en 1355, par le Prince Noir, les habitants, menacés de famine, mirent en commun tout ce qu’ils avaient pour nourrir les soldats de la ville. Lard, saucisses, porcs, fèves, viandes. Le tout à mijoter dans une grande jatte. Revigorés par ce repas, les soldats chauriens boutèrent les Anglais hors du Lauragais.

Cet épisode fait allusion à la mise à sac de la ville par Édouard de Woodstock, dit le Prince Noir, ce n’était pas un siège mais un incendie de la ville provoqué par les Anglais.

De nos jours, on ne parle plus de fèves mais de haricots lingots. Le haricot lingot est une variété particulière, le phaseolus arborigineus  qui a vu le jour dans une zone allant du Mexique au Pérou et à la Colombie. C’est une liane grimpante qui donne des graines. Rapporté par Christophe Colomb en 1530, comme curiosité botanique. Pietro Valerio, un chanoine, reçu du pape Clément VII quelques haricots qu’il cultiva. Le chanoine découvrit leur utilité alimentaire. Alexandre de Médicis va offrir un sac de ces haricots à sa sœur pour son mariage avec le dauphin de France, futur Henri II.

Catherine de Médicis, devenue comtesse du Lauragais en 1553, va jouer vraisemblablement un rôle pour imposer la culture de cette plante dans le Lauragais. Peu à peu la graine sera cultivée dans tout le Sud-ouest. En 1637, un curé d’Agde cultive le haricot et lance la mode de ces pois blancs appelés Flaviols ou Mounjetas dans le Tarn.

Le cassoulet qui portait le nom d’estouffet ou de ragoût, prend officiellement son nom au XVIIIème siècle.

 

Castelnaudary a su s’approprier la cassole, le haricot lingot, et perfectionner la recette qui deviendra officielle en 1909. La tradition chaurienne va donner à ce plat une saveur inégalée en l’apportant à cuire au four du boulanger, chauffé avec du bois de la Montagne Noire. Et pour le rendre encore plus savoureux, il est recommandé de faire tremper les haricots dans l’eau de « Co d’en Sens », source qui alimente Castelnaudary depuis 1853.

 

Comme toutes les bonnes choses dans notre pays, le cassoulet a sa confrérie.

Chaque endroit a ses gourmandises

Et vante ses bons morceaux

Lagrasse a ses perdrix grises

La Villasavary suce ses melons

Albi dore ses gimblettes

Limoux fait mousser sa blanquette

Castelnaudary seul a le cassoulet