LE FUTUR DE NOS ARMÉES

Le souhait du Président de la République de relancer la conscription n’est pas réalisable. Voyons maintenant les raisons de l’impossibilité de cette relance et un peu d’Histoire.

La loi Jourdan-Delbrel du 5 septembre 1798, institue la conscription universelle obligatoire pour tous les hommes âgés de 20 à 25 ans. C’est le texte fondateur du service national en France.

En 1996, le Président de la République, Jacques Chirac, prend la décision de professionnaliser nos armées et de suspendre le service national. Officiellement, il ne s’agit pas d’une suppression, mais d’une suspension.

« L’appel sous les drapeaux est suspendu pour tous français qui sont nés

après le 31 décembre 1978… et rétabli à tout moment par la loi dès que

les conditions de la défense de la Nation l’exigent ou que les objectifs

assignés aux armées le nécessitent ».

                                                                             Loi du 28 octobre 1997

En 2023, pour l’Armée de Terre, nous avions 14 556 officiers, 38 270 sous-officiers, 58 637 militaires du rang, 7 915 civils et 24 919 réservistes, soit 144 686 personnels. Les forces armées de métiers comportaient 201 332 militaires d’active et 62 353 personnels civils. Capacité de projection : 31 000 soldats en position OPS (opérationnelle), il faut faire des relèves après une période de 4 mois, puis 2 000 soldats pré- positionnés à l’étranger, 4 000 soldats en force de souveraineté dans les DOM-TOM.

L’Armée de Terre représente 56 % du total de nos armées, 19 % pour l’Armée de l’Air et de l’Espace, 17 % pour la Marine et 8 % de non affectés.

En réalité, l’Armée de Terre ne peut aligner que 77 000 combattants au total et simultanément. En 2025, l’Armée française (Terre-Air-Mer) c’est 274 936 personnels (soldats et civils) et 47 000 réservistes. Pour vous donner une idée plus « visuelle », cela représente 1 soldat pour 25 km de frontières terrestres et maritimes. Ce qu’il faut savoir,  c’est que les chiffres annoncés officiellement ne précisent pas que les Marins pompiers de Marseille, les Pompiers de Paris, la Protection civile, la Chorale de l’Armée, un grand nombre de sportifs etc, sont dans le total des effectifs. Certes, ce sont des militaires mais qui ne sont pas engagés dans des unités de combat. De plus, les conflits futurs, particulièrement à haute intensité, feront beaucoup de morts au combat. Il faudra une masse de réserve.

Dans les exercices de combat, les « bleus » gagnent toujours contre les « rouges » et n’ont pas de pertes. Il faudra apprendre à manœuvrer avec une perte de 50 % de l’effectif, le chef de section peut lui aussi perdre la vie, son adjoint devra prendre la suite etc…

Les raisons de la suspension du service militaire obligatoire (SMO) sont rarement évoquées, alors quelles sont essentielles pour comprendre et surtout pour ne pas refaire les mêmes erreurs. Le SMO avait pour but d’inculquer discipline et engagement. Mais dans les années 80/90, les cas d’indiscipline et de rébellion se sont multipliés, notamment parmi certains appelés issus de l’immigration, dont une partie refusait de se plier aux règles militaires.

En 1990, le colonel Yves Biville rend un rapport dans lequel il établit que les Français d’origine maghrébine sont 3,5 fois plus impliqués dans les désertions que les autres, 4 fois plus dans les bagarres, 5 fois plus dans les affaires de drogue, 6 fois plus dans les cas de désobéissance et d’outrage et 8 fois plus dans les cas d’insoumission.

Le commandement militaire a alerté sur le danger potentiel d’un service militaire où certains jeunes issus de l’immigration, loin d’être intégrés à la Nation, pouvait acquérir un savoir-faire militaire exploitable dans le contexte de révolte urbaine. La crainte de voir des compétences tactiques diffusées chez des profils à risque, a pesé lourd dans la balance de la suspension du SMO.

Après la fin de la menace soviétique en 1991, de nombreuses casernes ont été fermées, le budget vu à la baisse et donc les effectifs et les moyens ont diminué. Ces constats expliquent pourquoi un retour au SMO est pratiquement impossible sous la forme ancienne. Nous n’avons plus ni les moyens financiers, ni les bâtiments, ni les personnels d’encadrement nécessaire. Les problèmes posés par certains jeunes issus de l’immigration seraient encore plus lourds. Depuis la suspension du SMO, de nombreuses casernes ont été transformées en logements sociaux ou bâtiments administratives, ou détruites.

Un exemple : en juin 1999, sur le porte-avion Foch, une soixantaine de marins d’origine maghrébine, ont pris en otage un officier, réagissant contre une punition collective, suite à une rébellion. Ils avaient réagi lors d’une mission au large de la Yougoslavie au cours de laquelle les Supers-Étendards avaient effectué des frappes sur le Kossovo, considéré par les marins français musulmans comme un sanctuaire islamique.

Autre remarque : le recrutement de 15 000 militaires par an n’est pas tenable. Avec une évolution démographique vers la baisse, en 2035, la classe d’âge des 20 ans aura décru de 100 000 personnes par rapport à aujourd’hui.

Après la chute du Pacte de Varsovie, on est passé d’une armée d’appelés à une armée professionnelle. Dans le futur, nous sommes sur le point de passer d’une armée professionnelle à une armée plurielle ; professionnelle, réserviste et service militaire de conscription. Mais ceci a un coût.

On estime à 14,5 milliards d’€ par an pour 600 000 jeunes hommes/femmes, hors coût des infrastructures nouvelles.

Autrefois, les régiments possédaient en réserve mobilisation les matériels roulants, armements, équipements, en réserve « Mob » pour une 4ème ou 5ème compagnie de combat. Le personnel était le dernier contingent libéré et les cadres de réserve, rappelés en cas de mobilisation générale. Cette dernière unité formée était logée dans le bâtiment de la compagnie d’instruction. Ceci permettrait dans l’avenir de pallier au manque d’infrastructure suite à la démolition de nos casernes.

Les matériels étaient en position « stockage courte durée ». Quelques cadres d’active, officiers et sous-officiers, étaient désignés pour rejoindre l’unité de réserve. En intégrant le contingent directement au sein d’unités professionnelles, une osmose bénéfique va se créer. Il ne faudra pas utiliser les personnels du contingent pour repeindre en blanc les cailloux de l’allée centrale de la caserne, mais les intégrer dans toutes les activités et exercices.

Autres arguments, le fait d’être intégré et de participer pleinement aux activités du régiment, va susciter des vocations et faciliter le recrutement de notre armée.

La détection des jeunes recrues dans des domaines de pointes va orienter leurs affectations vers des unités spécialisées comme la guerre électronique. Certains y trouveront leur vocation.

Dans ce domaine, nos capacités sont très limitées. Le retrait des Transall C-160 Gabriel et le retard du programme « Archange », et de plus, les problèmes sur le programme ALSR VADOR font que nous sommes au fond d’un trou noir. La solution est prévue, nous dit-on, pour 2027.

Il faudra donc demander à nos futurs adversaires d’attendre 10 ou 15 ans avant de nous déclarer la guerre, nous ne sommes pas encore prêts.